Si Omar Sy est un habitué du doublage (Lascars, Arthur et la vengeance de Maltazard, Mune, Angry Birds...), il s'agit de la seconde expérience de Louane Emera après Les Trolls et de la première fois pour Franck Gastambide, Vincent Lacoste et Jean Dujardin.
Pierre Coré est particulièrement friand des road-movies en tant que spectateur et donc aussi en tant que réalisateur ; dans The Little Cat is dead, court-métrage live, "le voyage était à la fois géographique et intérieur pour les deux héroïnes", explique-t-il. "Aujourd’hui, la traversée du désert est au coeur de Sahara et le road movie sera le fil conducteur de mon premier film live. Il implique toujours une trajectoire des personnages qui n’est jamais celle prévue au départ et des rencontres révélatrices. C’est le chemin parcouru et non l’objectif qui compte".
Pierre Coré écrivait des livres pour enfants en parallèle de ses courts-métrages. Après avoir rencontré l’équipe de La Station Animation, le réalisateur a pu concrétiser plusieurs projets de séries puis esquissé une envie de long-métrage. S'il était hors de question de rivaliser avec Disney ou encore Pixar, le studio était toutefois motivé à se lancer dans l'aventure. "Face à ces mastodontes, La Station est un jeune studio plein de fougue : on voulait s’aventurer dans le long métrage à condition de le maîtriser. Impossible, par exemple, de se lancer dans un projet comme Un monstre à Paris avec des grands mouvements de foule et une reconstitution historique", reconnaît le réalisateur. "J’avais écrit un premier traitement qui se passait sur la banquise avec des manchots… mais, peu de temps après, ce fut la déferlante de films d’animation comme Happy Feet et Les Rois de la glisse ! Il ne restait qu’un autre grand espace à explorer : le désert". Le projet de Sahara remonte à six ans.
Quatorze versions du scénario étaient nécessaires pour finaliser l'histoire de Sahara, ce qui n'a jamais inquiété Pierre Coré : "J’ai toujours eu foi en Sahara malgré le temps qui s’écoulait. Trouver des péripéties n’a jamais été un problème : notre plus grand défi a été de faire en sorte que les scènes s’articulent autour des caractères et non l’inverse. Ce sont Ajar, Pitt et tous les autres qui donnent au film son identité".
Les personnages ont été réinterprétés pour être les plus attachants possibles. Certaines caractéristiques des serpents et des scorpions ont ainsi été gommées, et les dessins stylisés, pour rendre les héros attachants et sympathiques. "D’un point de vue occidental, les serpents sont souvent considérés comme effrayants : on ne voit que leur langue fourchue, leur oeil sur le côté, leurs écailles et cette manière de se déplacer qui est si imprévisible ! Nous avons donc supprimé certaines de leurs caractéristiques, sources de fantasmes, comme les crochets ; j’ai remplacé les écailles par une forme de tatouage, dessiné un regard frontal et changé les démarches. Ajar se déplace de manière quasi rectiligne, le torse relevé. Et sa queue, faisant office de petit moteur, le rapproche d’un centaure !", décrit notamment Pierre Coré.
Pierre Coré a opté pour un dessin classique inspiré de Disney pour Sahara. Il explique son choix : "Demander au public de s’adapter à un design singulier alors que les protagonistes sont déjà des antihéros et des animaux qui suscitent des phobies, c’était multiplier les contraintes. Opter pour une forme de classicisme rassurait tous les partenaires, ce qui pour un projet au long cours et que l’on souhaitait familial était nécessaire".
Pierre Coré aborde des questions difficiles dans Sahara, comme le racisme, le classisme et l'exclusion de manière générale. "À diverses époques de ma vie, j’ai éprouvé l’exclusion du groupe social et le poids de la différence de classes", confie-t-il. "J’ai beaucoup d’affection envers Ajar : il est très à l’aise dans l’action mais constamment dans le doute, ce qui permet aux autres de le déstabiliser. Ajar s’exprime avec difficulté, cherche ses mots, clame que « oui » puis que « non » enfin « peut-être » : il est en pleine construction, en chantier !"
À la fois réalisateur, scénariste et producteur de Sahara, Pierre Coré devait composer avec une triple casquette pas toujours évidente à porter. "Le plus grand défi à relever est de concilier le rôle de producteur – focalisé sur les dépassements de budget ; obligé de décider quels postes privilégier – et les desiderata du réalisateur – pour qui rien n’est impossible et certains points non négociables !", s'amuse-t-il.
Le film a été conçu en deux parties : quatorze mois à Paris puis quatorze mois à Montréal. "Nous avons voulu garder la maîtrise du développement artistique en concevant à Paris les story-boards, le design, les recherches couleur, la modélisation des personnages et des décors principaux. Toute la grammaire du film a été validée avant de partir au Canada, ce qui nous préservait des dépassements de budget et de délais. L’équipe de Mikros, composée d’environ 80 personnes, s’est pleinement investie dans le projet. C’était un coup de coeur partagé", déclare Pierre Coré.
Une scène de Sahara a été particulièrement difficile à élaborer : celle du combat de danse entre les deux serpents femelles, Eva et Pietra. "Quand tu l’écris, cela te prend une ligne de scénario et tu es ravi. La concevoir et la mettre en scène, c’est le grand écart entre ton rêve et la réalité", se souvient Pierre Coré. "Il fallait d’abord trouver des références puis les interpréter : la danse, c’est tout un corps en mouvement. Retranscrire une chorégraphie avec deux personnages qui n’ont ni bras, ni pieds, ni bassin, c’est un immense défi !". Le réalisateur s'est notamment inspiré de vidéos de battles de hip-hop. Six personnes se sont occupées de cette scène à temps plein pendant deux mois.
Sahara regorge de clins d'oeil cinéphiles destinés aux adultes, tels que des références à La Planète des Singes ou encore Freaks.