Ce qui est très troublant, c'est la question du regard de l'artiste, visionnaire dès l'enfance, parce que marqué par la réception des événements partagés avec sa tante d'apparence un peu foldingue. Elle lui donne le mot d'ordre, qui guidera sa vie : "ce que tu vois est vrai. Ne détourne jamais le regard". Il se trouve que je lis actuellement "Les enfants d'Asperger" d'Edith Sheffer. Cette historienne décrit l'organisation de la santé mentale sous le 3ème Reich. Les conditions d'internement de la tante Elisabeth sont exactement celles décrites dans ce livre. C'était très impressionnant de voir à l'écran ce que je lisais ! A quelles conditions peut-on créer, procréer ? Il y a de l'inéluctable, du déterminé et du déterminant dans la création de Kurt. Son côté visionnaire fait qu'il n'est pas tout à fait l'auteur, puisqu'il est mû par des forces invisibles, qui le poussent à créer, à peindre sans savoir où il va. C'est un film sur les sens. La vue, l'ouïe sont des "outils" conséquents, y compris pour l'horrible beau-père de Kurt sauvé par ce qu'il entend et l'oblige à agir sans autre motif que de savoir qu'il y a à intervenir. Point d'opportunisme dans sa démarche. Juste faire, parce qu'il sait. Comme Kurt, qui ne dit rien de son art, il fait parce qu'il sait qu'il doit faire. Les postures sont engagées, mais non militantes. C'est sans doute cela qui rend le mieux compte du titre si particulier "L'oeuvre sans auteur".
Avec cette saga ambitieuse explorant 30 années cruciales de l'histoire de l'Allemagne (de l'immédiat avant-guerre à l'édification du mur), F.H von Donnersmarck se mesure efficacement à l'inconscient collectif de son peuple. Il le fait de façon peut-être un peu "scolaire", appliquée, sans lésiner sur les moyens (photo magnifique, bande son ample, le tout réussissant à susciter l'émotion même si le trait est appuyé parfois) ni sur la qualité des acteurs, tous excellents. Non content de chercher à exorciser les démons allemands, il aborde une réflexion sur le rôle de l'art et sa place dans la société, sur le processus créatif, qu'il soit catharsis ou fumisterie intéressée. J'ai assisté à une projection des deux parties consécutives, et malgré une petite baisse de rythme (dans le dernier tiers du premier film et le premier tiers du deuxième disons), je n'ai pas vu le temps passer... Dans la scène d'intro, en 1937 le guide "artistique" nazi d'une expo sur l'art dégénéré assène à des visiteurs ses commentaires caustiques sur les oeuvres des grands noms de l'entre-deux-guerres (Kandinsky, Picasso, Mondrian, Schiele entre autres si mes souvenirs sont bons...). Le tout jeune Kurt, que sa tante chérie Elisabeth accompagne à l'expo, entend ces inepties, mais sa tante le met en garde discrètement contre le formatage. Dix ans et pas mal de traumatismes plus tard, alors qu'il vient d'intégrer une école d'art à l'Est, son nouveau professeur, communiste cette fois, lui fait un cours tout aussi inepte sur la supériorité de l'art quand il renonce à l'expression des individualités, pour se consacrer à magnifier la grandeur des masses travailleuses. Il dénonce les mêmes artistes peu ou prou que les extravagants qualifiés par les nazis de dégénérés dix ans plus tôt. Tout est dit quant aux ravages des totalitarismes sur la créativité, mais passé à l'ouest après une autre décennie, il faudra du temps à Kurt pour trouver son chemin de créateur au milieu de la nouvelle jungle artistique contemporaine foutraque, aidé en cela par un autre professeur malmené comme lui par la guerre. Les scènes ayant trait à l'explosion de son inspiration sont très... inspirées, pour moi les plus belles de ce film fleuve, magnifiées par une bande-son de classique qui envoie du bois sans complexe. Les ficelles sont grosses, peut-être, mais pour moi elles ont fonctionné ! Un bémol viendrait peut-être du happy-end un poil convenu, mais voir ce film est quand-même un bon moyen pour tenter d'entrer dans l'esprit de la modernité allemande, emblématique de la deutsche Qualität filmique contemporaine, au même titre que "Frantz" par exemple...
Quand on a la chance de voir un chef-d'oeuvre comme "L'Oeuvre sans auteur 1 et 2", il y a un avant et... un après... Aussi fort que "La Vie des autres" et pourtant tellement différent... Mais comment fait ce cinéaste ???
Un film très intéressant et dont la construction scénaristique complexe donne de la profondeur. L'acteur principal est un peu en deçà du reste du casting et c'est dommage mais c'est un formidable portrait de l'Amlemagne...
Dans une restitution assez réussie des tristes années 30, le film nous emmène jusque dans les années 60. On passe évidemment par cette très sombre période de l’histoire de l’Allemagne, où il était question, entre autre, d’euthanasier les inutiles. Et c’est là que commence l’histoire du tout jeune Gerhard Richter, lorsque sa tante l’emmène voir la fameuse exposition, je cite « de l’art dégénéré », pour ce petit bonhomme c’est le déclic ; il sera peintre. La suite vous la connaîtrez en allant voir ce petit bijou de maîtrise, aussi bien dans les images que dans la mise en scène et le jeu des acteurs, une harmonie parfaite. On est scotché du début jusqu’à la fin. 4 étoiles.
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0,5
Publiée le 19 juin 2020
Contrairement à The Tin Drum de Volker Schlondorf qui jette un regard sans équivoque sur le plongeon de l'Allemagne dans la Seconde Guerre mondiale. L'Oeuvre sans auteur jette un regard beaucoup plus rêveur sur le même problème. Pour faire bonne mesure le personnage central est originaire de Dresde dans l'ancienne RDA de sorte qu'il souffre des vicissitudes de la guerre froide. Le mal de l'Allemagne nazie est représenté par un médecin qui avait stérilisé et même gazéifié des personnes jugées inutiles par le régime. Ce médecin est si mauvais qu'il tue même les Aryens comme la belle jeune tante du personnage central. Il est aussi incestueux et pédophile. Le réalisateur von Donnersmarck semble penser que la beauté féminine nue peut nous épater. Ce film scénarisé par le réalisateur Florian Henckel von Donnersmarck voit aussi le personnage principal incapable d'avoir un enfant. Il y a une séquence vraiment pathétique dans laquelle cette tante infortunée parle aux chauffeurs de bus ce qui lui donne quelque chose qui ressemble à un "orgasme spirituel". Entre les deux le film se déroule pendant 188 minutes atrocement inutiles. Le personnage central propose une amélioration des plus innovantes sur les toiles non peintes, il fait des peintures à partir de photographies. Ces chefs-d'œuvre (?) réunissent médecin, tante, personnage central et cerveaux de l'élimination humaine du régime nazi. Un film pathétique et grotesque et je ne regarderai surement pas la seconde partie...
voilà une histoire de plus sur le nazisme et ses ravages à travers des personnages qui suscitent très vite l'empathie, mais quel dommage de tourner un tel film comme une série et le laisser se finir en queue de poison ! j'irais qd mm voir la partie 2, mais découper ainsi une histoire en 2 n'est pas digne du 7eme art, mais tout simplement d'une série qui rend captif les quidams qui ce soir là étaient nbreux à ne pas comprendre pourquoi la fin était arrivée aussi tôt et de manière si déplacé, cad comme une série commerciale :-(
à travers l'histoire d'un artiste , les questions sont posées , comment traverse t on les guerres , comment passe t on à la reconstruction ,que faire des traumatismes et de l'ombre des humains persécuteurs qui remettraient bien le couvert ...film très bien pensé ,interprété ,très belle musique ...bravo
Vu en avant première aux rencontres d'art et essai de Bretagne 2019...ce film est une déception malgré le talent du réalisateur (La vie des autres)... Film de 3 heures au total, couvrant 30 ans de l'histoire de l'Allemagne sous le prisme de la peinture depuis l'exposition de l'art qualifié de "dégénéré" par les nazis en 1937, à l'art sous contrôle de l'idéologie communiste et à l'art conceptuel des années 60.... Aucun detour, aucun bavardage ne nous sont épargnés : les internements, les chambres à gaz, Berlin en ruines, les poncifs sur l'art contemporain, les méchants communistes qui brident la création... On a droit à des caméras qui tournent autour des personnages quand ils sont contents, ou des petites chorégraphies en nettoyant des escaliers... Bref...Le cinéma allemand aurait-il trouvé son Claude Lellouch ?
Tout est réussi. Que dire de plus... De l'émotion, une histoire intense, une mise en scène d'un trés grand réalisateur, des interprètes tous meilleures les uns que les autres. Et en plus, une poésie féroce. J'adore ! Foncez à la partie 2 !
Mise en scène totalement froide, ambiance téléfilm, ça joue assez faux par moment. J'ai pas réussi à rentrer dedans, l'ennui a gagné. J'ai décroché. C'est dommage ça aurait pu être bien vu les ingrédients.
Une œuvre absolument remarquable un scénario une histoire des acteurs et actrices tout ce que l'on peut attendre d'un film celui ci l'offre en plus l'esthétisme ce film est un pur chef d'œuvre