Paul Sneijder, cadre supérieur français établi depuis de nombreuses années à Montréal, la soixantaine, est victime d'un accident totalement rarissime d'ascenseur (surtout quand la machine, pilotée par ordinateur, dispose de 3 systèmes de sécurité, dont il paraît impensable qu'ils soient tous défaillants en même temps !). Il était venu déjeuner avec sa fille, Marie, dans l'hôtel où celle-ci séjournait, lors d'une de ses rares visites - elle habitait Toulouse, où Paul vivait et travaillait 20 ans plus tôt, avant son divorce, alors qu'elle était encore une toute petite fille. S'il a miraculeusement survécu à la chute de la cabine, Marie en est morte. Outre la compensation de son préjudice à lui, physique (il a été blessé dans l'accident) et professionnel (longues semaines de convalescence, lourde médication.. donc pause forcée dans ses activités), la question va se poser du "pretium doloris", c'est-à-dire des dommages-intérêts devant réparer la perte de son enfant ("mettre un prix sur ce qui n'a pas de prix"...). Sa deuxième femme, Anna (Géraldine Pailhas) le presse en ce sens, voyant en la circonstance l'occasion d'assurer l'avenir de leurs fils, bientôt en âge de faire des études supérieures, et ambitionnant d'intégrer un cursus prestigieux, mais fort coûteux, aux E-U. Paul, pour résister au choc émotionnel sans nom subi (survivre, quand sa fille, dont il s'était tant éloigné, meurt à ses côtés - douleur double, celle du deuil, et celle de la culpabilité..) doit se "reconstruire". Impérativement. Il va le faire, par étapes, à sa façon, inventant une thérapie sur mesures, jusqu'à la catharsis finale
(en haut du plus haut building du monde, à 150 étages du sol...à Dubaï).
Les étapes vers la réappropriation de l'estime de soi sonnent "improbables", au fil de rencontres, positives (le propriétaire d'une petite entreprise de "dog walk", un obèse qui ne se sent bien qu'en compagnie des... nombres premiers, et l'avocat de la "partie adverse", en particulier), ou négatives (comme avec le propriétaire de "Charlie", à l'ego surdimensionné, le rêvant en "danseur mondain" pour chiens, à son service, ou avec l'avocat pressenti pour le représenter, tout excité par les di à faire obtenir à Paul - les avocats outre-Atlantique travaillent au pourcentage !). Sans oublier, au temps où Paul se fait "dog walker", les chiens... Ces boules de tendresse, qui ont cette faculté merveilleuse de boire les douleurs des hommes, à la manière d'un buvard. Thomas Vincent, qui a fait surtout pas mal de réalisations pour la télévision (et que je découvre, pour ma part, ici), réussit l'adaptation du roman de Jean-Paul Dubois (décidément auteur bien servi au cinéma ces temps-ci - voir "Le Fils de Jean", par Philippe Lioret, dont la scène est également au Québec..), "Le cas Sneijder". Réussite en tous points. On est bien loin de l'univers frelaté du boboland, façon (pour rester dans l'actualité cinéma) d'un "Captain Fantastic" - par exemple. Là, tout sonne vrai, tout sonne juste... Quant à "Paul", Thierry Lhermitte lui donne excellemment vie. Les seconds rôles, canadiens, sont à louer aussi ! Seule Géraldine Pailhas (inaudible le plus souvent, d'ailleurs) déçoit - et c'est un euphémisme...
Un très bon film, que je suis ravie d'avoir pu découvrir, en "rattrapage" (streaming), l'ayant raté lors de sa sortie en salles, il y a quelques mois.