« Les Gardiennes », tout simplement un merveilleux film lumineux et délicat, à l’image d’une véritable révélation en la personne de Iris Bry, dotée d’une simplicité naturelle doublée d’une grâce évidente, au point d’irradier totalement à l’écran !
Pivot central de l’histoire presque à son insu, Francine venue de l’assistance publique, va être en effet l’enjeu de cette famille qui l’emploie et l’accueille dans un climat apparemment paisible et serein...
Au point de voler la vedette à ceux qui l’entourent, car Nathalie Baye, Laura Smet, Cyril Descours, sont eux aussi d’une justesse vraie par toute la souffrance et la dureté que cette guerre leur impose au quotidien.
Leurs conditions de vie sont filmées sans concession, sans faire semblant et dans un silence le plus souvent terrible et oppressant, par la caméra de Xavier Beauvois qui met ici toute sa touche personnelle pour nous plonger sans commune mesure parmi l’existence éprouvante de ces femmes de l’époque auxquelles incombaient toutes les responsabilités et tâches de la ferme.
Et au delà de la description très bien rendue, au delà de cette atmosphère de labeur, de peur et d’angoisse, on se prend aussi tout doucement d’intérêt pour chacun de ces personnages, tant le cinéaste arrive à donner à tous une vraie personnalité que l’on suivra d’autant plus que se dessine à l’horizon une intrigue qui va nous piquer au vif !
Sans en dire trop, cette histoire devient même passionnante quant au devenir de chaque membre de cette ferme...
On voit se profiler mine de rien avec effroi les décisions et les actes qui seront pris par Hortense, en fonction de ce que cette maîtresse femme de la terre, peut percevoir et utiliser à dessein pour servir sa cause et celle des siens !
À travers toute cette histoire de famille et plus particulièrement cette communauté de femmes durant la guerre 14-18, Xavier Beauvois signe en compagnie de son opératrice Caroline Champetier, un film d’une beauté rare où la peinture de Jean-François Millet n’est jamais bien loin, un film taiseux fait de regards et de ressentis qui en disent bien plus que de simples mots, un film construit solidement et patiemment pierre par pierre à l’image de ces travaux de la ferme inlassablement répétés, mais dont le poids des « valeurs et traditions » aura finalement lui, le dernier véritable mot...
Et donc un film intelligent, subtil qu’il faudra découvrir en même temps que Iris Bry, assurément sublime à elle seule !