Depuis 2010 et "Des hommes et des dieux", Grand Prix du Festival de Cannes 2010 et César du meilleur film français l’année suivante, Xavier Beauvois s’est montré davantage présent comme acteur que comme réalisateur. Sorti en janvier 2015, son sixième film, "La rançon de la gloire", n’avait reçu qu’un accueil mitigé. Voici le 7ème, "Les gardiennes", première adaptation d’un roman par le réalisateur, premier tournage en numérique.
Le travail effectué par les femmes durant la première guerre mondiale, c’est, entre autre, ce que nous montre Xavier Beauvois dans "Les gardiennes", adaptation très libre du roman homonyme de Ernest Pérochon, paru en 1924. Ce film nous conduit dans une famille en charge d’une ferme dans le Limousin. Hortense, la doyenne, est la mère de 3 enfants : sa fille, Solange, ne pourra jamais avoir d’enfant, mais Clovis, l’homme qu’elle a épousé, avait eu une fille, Marguerite, de son premier mariage ; Constant est instituteur et c’est avec le grade de lieutenant qu’il combat dans les tranchées ; Quant à Georges, le plus jeune, il considère Marguerite comme sa petite sœur, ce qui n’empêche pas cette dernière d’être amoureuse de lui. Ces 3 hommes ont été réquisitionnés et ils ne reviennent que de temps en temps, pour de courtes permissions. D’où la nécessité, pour Hortense, d’engager une jeune fille pour aider aux divers travaux de la ferme : c’est Francine, 20 ans, qui vient de l’assistance publique.
Si le film consacre donc beaucoup de temps à dépeindre la vie à la ferme dans ce début de 20ème siècle, avec de belles images inspirées par Millet et Courbet, il raconte aussi les drames vécus par la famille, l’amour qui nait entre Francine et Georges, l’absence du mari qui trouble certaines femmes, le poids des rumeurs dans un petit village, l’injustice que peut commettre une mère pour sauver la réputation de sa fille. De ce beau sujet, Xavier Beauvois a fait un film esthétiquement très réussi mais qui glisse parfois dans le pathos et qui manque de temps en temps de vivacité et de chaleur humaine. En vérité, pour son premier film tourné en numérique, le réalisateur est malheureusement tombé dans le défaut provenant des nouvelles conditions économiques générées par cette technique : le film trop long !
On connait depuis longtemps les qualités de Xavier Beauvois. C’est sans doute pourquoi on peut avoir tendance à se montrer plus sévère avec lui qu’avec des réalisateurs dont on attend moins. Toutefois, ce n’est pas être particulièrement sévère que d’avoir tendance à renâcler devant certaines longueurs de ce film, par ailleurs fort estimable. Et puis, est-ce être sévère avec Nathalie Baye que de lui reprocher le retour de certains tics qu’on pensait avoir été définitivement gommés dans son jeu ?