Objet d’une polémique notoire, phénomène décrié comme xénophobe, Midnight Express, long métrage signé Alan Parker n’aura cessé de faire parler du lui des années durant. Consacré par une certaine partie des cinéphiles de jadis comme étant culte, le récit gênant, difficilement supportable, de ce jeune touriste américain pris la main dans le sac pour transport de drogues à l’aéroport d’Istanbul aura troublé l’opinion publique au début des années 70 et marqué les amateurs de cinéma choc en 1978. Incarné par un acteur qui disparaîtra tout bonnement par la suite, Brad Davis, le personnage de Hayes est la victime d’un régime semi-totalitaire, ayant non pas conscience de l’individu mais de l’intégrité de leur état. Alors que le président Nixon s’affiche comme l’ennemi de la Turquie, le jeune détenu se voit très vite accusé de contrebande de narcotiques et voit sa peine, après quelques espoirs, drastiquement prolongée. Le transport de 2 kilos de Haschisch est-il punissable d’une peine de prison à vie?
Midnight Express, littéralement le train de minuit, s’impose comme la seule alternative à ce jeune américain malmené par le système pénitencier d’un pays qui n’appréciait pas les bonnes manières. Xénophobe, sans doute que le film d’Alan Parker l’est. N’oublions pas que les faits narrés dans le film sont encore tout frais dans le l’inconscient collectif américain dans les années 70. La barbarie des matons, l’insouciance d’une justice peu scrupuleuse, les affres d’une bureaucratie corrompue jusqu’aux os, l’image de la Turquie en prend un sérieux coup. L’américain, assis au sommet d’une pyramide social qu’il s’image véridique, aime alors se plaindre et se décrire martyr des mauvaises expériences faites à l’étranger. En vérité, outre le fait que le film était clairement, en son temps, un parti pris américain permettant de dénoncer l’absurdité de la condition même d’être turque, la scène du tribunal, forte mais haineuse, en témoigne, il apparaît pourtant que considérer le jeune passeur de drogue comme étant innocent n’est pas pour autant rationnel.
Un délit entraîne le destin d’un jeune homme vers les tréfonds de l’enfer carcéral, sous-jacent à un milieu diplomatique et politique belliqueux. Considéré comme tel, le film d’Alan Parker est un véritable coup sur la tête. L’injustice à laquelle est soumis notre brave touriste adepte de la fumette en fait le martyr occidental auquel la jeunesse d’alors pouvait se reconnaître. Voilà en somme pourquoi Midnight Express est devenu si populaire Outre-Atlantique. Outre son approche politique et sociale douteuse, le film d’Alan Parker reste et restera un film très bien réalisé, diablement efficace du fait que les souffrances de Hayes, morales et physiques, en deviennent les nôtres. Littéralement massacré par une justice aveugle, le bonhomme s’enfonce toujours d’avantage vers une situation désespérée qui confine à l’angoisse.
Pour autant, malgré ses atouts strictement cinématographiques, le film d’Alan Parker s’affiche pourtant comme caricatural, non seulement envers les turques mais aussi envers des personnages stigmatisés. Le patron des matons, cruel et infernal n’est jamais présenté comme doté d’humanité, caricature, en est la preuve. Psychologiquement, Alan Parker ne s’intéresse qu’à son personnage principal, auquel il afflige quelques transformations malvenues, je pense là à son séjour dans une aile-hôpital de la prison, un asile. L’entier des séquences y ayant trait est une démonstration de caricature. Bref, fort, choquant, le film est aussi, malheureusement, désintéressé ou encore trop stéréotypé. Quoiqu’il en soit, la polémique n’étant pas à prendre en considération, Midnight Express est un film à voir au moins une fois. 12/20