Madrid, 9h du matin. Un homme est abattu d'un coup de feu en sortant d'un bar. Les autres clients du bar, n'osant sortir, restent terrés dans ce lieu et imaginent le pire : est-ce un tireur isolé ? Pourquoi la police n'intervient pas ? Se passe-t-il quelque chose de pire ? Forcément à force de rester enfermés ensemble, tous ces personnages hétéroclites (une jeune femme, un SDF, un hipster, un homme d'affaires, un ancien flic, un serveur...) finissent par devenir nerveux et lorsque la situation tourne vers une question de vie ou de mort, le pire de l'humanité s'exprime... Cinéaste amateur d'humour noir, amoureux du genre et très cynique, Alex de la Iglesia signe avec "Pris au piège" un film frappant où, à travers un huis-clos divisé en trois étapes, il montre son talent de metteur en scène. Sorti en VOD, "Pris au piège" est pourtant un pur film de cinéma où le cinéaste use de son sens du cadre (avec contre-plongées, mouvements de caméra, cadrages précis) pour nous immerger dans une ambiance qui se dégrade, révélant ce qu'il y a de pire en l'être humain. Non content d'utiliser les bases du huis-clos paranoïaque où forcément tout le monde se retourne contre tout le monde avec préjugés sociaux, de la Iglesia les dynamite, donnant de la profondeur à des personnages qui sont parfois lucides mais souvent odieux
en témoigne le personnage d'Israël, le SDF qui voit clair dans le jeu des autres, s'avérant plus malin mais aussi plus dangereux.
N'hésitant pas à dénoncer la cruauté de l'instinct de survie (lancée par une idée très simple mais très brillante arrivant à mi-chemin du film), il montre aussi les hommes tels qu'ils sont,
comme lors de la scène où, dans un moment critique, la belle jeune femme doit se retrouver en sous-vêtements pour passer dans un trou et que tout le monde la reluque sans vergogne (en plus c'est Blanca Suarez qui a le rôle alors vous imaginez...).
Si le dernier acte du film maintient la tension mais s'essouffle un peu en termes d'enjeux, "Pris au piège" n'en est pas moins un exercice de style réjouissant, bardé d'humour noir et de traits exagérés tout en étant désespérément lucide sur l'humanité. L'ensemble est non seulement drôle et cruel, il est également habilement mis en scène, s'avérant une belle réussite dont on ne devrait pas passer à côté.