« Ô temps ! suspends ton vol »… Ce ver, extrait du poème « Le lac » d’Alphonse de Lamartine, prend, au regard du film réalisé par Jean-François Laguionie, tout son sens, tant le film invite à la poésie, au souvenir, à la contemplation.
Sixième long métrage d’animation réalisé par Jean-Paul Laguionie, écrivain, scénariste et réalisateur, « Louise en hiver » est une œuvre singulière, poétique et paisible. Sa particularité première est sans nul doute le parti pris d’une animation réalisée à la gouache et au fusain sur papier Canson, ces dessins étant ensuite numérisés puis animés en 2D. On peut tout à fait voir le grain du papier à l’image, et cela donne au film une originalité et un charme loin d’être désuets ; renouant, au contraire, avec le côté artisanal du dessin animé d’antan. Les couleurs et la texture sont, en tout cas, très réussis et collent tout à fait à l’ambiance du film.
Invitation à la lenteur, à la contemplation, au souvenir, le film est à « prendre » comme il est, un voyage à travers la vie et les souvenirs quelque peu « brouillons » de Louise. Car après avoir raté le dernier train de la saison à la gare de la station balnéaire de Biligen-sur-Mer, cette dernière se retrouve à devoir affronter seule la marée qui arrive, oubliée de sa famille. Elle va vivre au jour le jour sur la plage, dans un abri de fortune qu’elle aura elle-même bricolé. Biligen-sur-Mer est une ville imaginaire, inspirée par les paysages de Normandie et de Bretagne.
Les souvenirs de Louise vont se réveiller dans certaines scènes, au détour de certains lieux qu’elle semble avoir connus plus jeune. Mais on ne sait jamais très bien, tout comme elle, si ce sont de vrais souvenirs ou le fruit de son imagination, si bien que l’on se posera nous-mêmes la question lors du visionnage du film. Louise va vivre sa petite vie tranquille chaque jour, et la narration effectuée par Dominique Frot, qui prête ici sa voix à Louise, convient tout à fait à cet éloge de la flânerie, de la lenteur, et de la douceur de vivre. Entre recherche de nourriture, balades jusqu’à la falaise ou en bord de mer, qui vont l’amener à revivre ses souvenirs, ses journées passeront ainsi, cahin-caha, au fil des saisons et au rythme de ses envies.
Pépère est un personnage qui m’a « réveillé » à un moment où la petite vie de Louise, certes tranquille mais parfois un peu monotone, ronronnait quelque peu. Tellement attachant, Pépère va jouer un rôle important dans le quotidien de Louise. Car même si elle n’ose pas se l’avouer, Louise se sent seule et Pépère va être un compagnon avec qui elle va pouvoir échanger et partager sur ses questionnements de vie. Il va même la sauver à un moment du film, au sens propre comme au sens figuré du terme. Sa présence va se révéler indispensable et très agréable.
Œuvre particulière, surprenante, atypique et parfois étrange, « Louise en hiver » révèle une beauté esthétique, pure, tout en douceur et en couleurs pastel, véritable ode aux souvenirs, et au temps qui passe (lentement). Faisant une nouvelle fois la part belle à l’animation française qui nous aura gâtés en 2016, avec également "Ma vie de Courgette" et "La Tortue Rouge".
Ma critique complète sur mon blog: reves-animes.com