N'ayant jamais été un grand admirateur du cinéaste, trouvant sa symétrie systématique étouffante et mécanique, "Isle of Dogs" représente une surprise de poids. Si on peut évoquer comme défaut une représentation culturelle du Japon parfois douteuse (le prologue, certains éléments iconographiques etc.) cela intervient dans une construction cinéphilique de son univers, l'utilisation d'une musique des "Sept Samouraïs" n'est pas anodine, sans que cela excuse les-dites maladresses.
Au delà de ça, Anderson livre une proposition de cinéma réjouissante, où son style donne enfin corps à son propos : celui d'un pouvoir écrasant, au sein duquel les laissés pour compte sont tout simplement évacués. Si on peut reprocher au récit d'expédier trop rapidement certains éléments décisifs (le passage de flambeau, la découverte de spot etc.), les décisions formelles, elles, ne flanchent jamais.
Le cinéaste, dans un geste impressionnant, questionne le pouvoir de l'image, aussi bien dans le récit, que dans sa mise en scène. Les split-screen, artificiels ou bien au sein même du cadre, se multiplient, Anderson démontrant que sa problématique principale est celle de la communication (les différentes langues, les médias etc.) et voit en l'image une solution, et une langue, universelle. En somme, c'est un renouvellement salvateur pour Anderson, qui emmène son cinéma vers des horizons inattendus.
Cependant, si le film est d'une grande richesse formelle et thématique, je ne peux m'empêcher de penser que mettre des mots sur les choix du réalisateur, bons comme mauvais, ce serait, finalement, en perdre la magie.