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Bertie Quincampoix
108 abonnés
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4,0
Publiée le 12 décembre 2017
Inventeur d'un langage cinématographique nouveau, entre documentaire ethnographique et fiction pure, Jean Rouch nous démontrait à travers La pyramide humaine toute l'étendue de son talent et de sa générosité. Ce projet réalisé avec un groupe d'étudiants européens et un groupe d'autochtones d'un lycée d'Abidjan nous offre une magnifique réflexion sur la construction des identités et la représentation de l'autre, de l'étranger. D'une modernité absolue dans son propos, ce film souvent drôle et très pédagogique est aussi un regard tendre et émouvant sur l'adolescence, représentée dans toute son humanité et sa complexité. Un magnifique acte de foi dans le septième art.
La première fois que j'ai entendu parler de Rouch c'était il me semble dans La contestation, un film à sketch où Godard réalisait. Il en disait du bien. Forcément j'ai été intrigué. Maintenant de ce film j'ai tout oublié, sauf justement que Godard parlait de Rouch. Et c'est donc le premier film du réalisateur que je vois.
Pour tout dire j'ai l'impression de voir un mélange de Pasolini (façon Orestie africaine) et de Rohmer. Le côté politique et film qui a conscience d'être une fiction pour Pasolini et le côté romance adolescente dans un laps de temps assez réduit pour Rohmer.
J'ai bien aimé cette façon de présenter le film, on a deux groupes d'étudiants l'un noir, l'un blanc qui ne se mélangent pas, en réalité comme en fiction et sous l'impulsion de l'une d'entre eux, ils vont se mélanger et vivre quelques temps en bons amis.
Si l'on c'était arrêté là le film n'aurait pas été terrible je pense. Le racisme ça ne m'intéresse pas du tout. Mais là le film va plus loin parce que même avant le racisme le principal sujet du film et la principale préoccupation n'est pas raciale mais bel et bien les fesses.
Ben oui cette jolie fille (qui ne se rend pas compte qu'elle est jolie, et qui dont est d'autant plus belle) elle ne sait pas où mettre la limite avec les garçons, elle ne veut pas les brusquer, elle les aime bien, mais sans plus.
Le comportement racial ne prend pas le devant sur le comportement humain des personnages. Du coup ça sonne d'autant plus vrai.
La plupart des acteurs amateurs croient dans leur personnage et vu qu'ils vivent quelque chose de similaire sur le tournage, ça permet vraiment d'y croire.
Cependant j'ai trouvé ça sans doute pas assez riche en émotions, peut-être à cause de cette théorisation.
Un psychodrame puissant, plein d'intelligence, de profondeur, de beauté, de tendresse, de justesse, bref de qualités, et aussi fort dans son propos optimiste qu'il est beau artistiquement. Car on savait Jean Rouch naturaliste, on le découvre impressioniste. Quelles couleurs, quelle mise en scène décapante, quelle bande-originale! Découpé en commentaire auto-explicatif et en histoire improvisée, "La pyramide humaine" s'avère être une perle rare, brillant de tout son éclat grâce au talent atypique et indescriptible de Jean Rouch. Un film qui n'a absolument pas vieilli, très instructif dans sa démarche pédagogique, et particulièrement remarquable. Le chef-d'œuvre de Jean Rouch.
Une oeuvre tout à fait constructive qui prend comme point de départ un simulacre du racisme entre la communauté européenne et la communauté africaine. Les héros sont des adolescents qui s'interrogent sur leur culture et sur celle d'Autrui. Jean Rouch a demandé à certains acteurs de jouer délibérément des personnages racistes pour ensuite les amener à connaître les défauts de l'Autre. Ainsi, le racisme cède la place à l'amour et à la culpabilité qui en découle. Jean Rouch conserve le style docu-fiction de Moi, un Noir ( tourné deux ans auparavant ) en dirigeant ces jeunes gens par le biais de l'improvisation. Une fois le simulacre achevé, le cinéaste le présente aux acteurs : il s'agit d'un " drame fictif qui libère ceux qui croyaient en leur jeu " ( tels sont les propos du réalisateur ). En définitive, La Pyramide Humaine est un formidable message d'espoir et de tolérance : il est moins question de croire en la différence qu'en l'Homme en général. Jean Rouch possède l'éloquence des grands maîtres : " Qu'importe l'histoire plausible ou décalquée, car il s'est passé quelque chose ". C'est un film respectable.