Bon, il y va y avoir beaucoup à dire sur ce film...
Le postulat de base est intéressant : une multinationale, la société Mirando, lance un programme scientifique ayant pour but de créer des "SuperCochons" OGM en implantant des élevages tests aux 4 coins du globe pour analyser l'impact des techniques d'élevage 'traditionnel' sur le développement de leur animal-éprouvette.
L'autre objectif de ce programme pour Lucy Mirando est de redorer le blason de l'entreprise, qui baigne dans un scandale sur fond de déchets chimiques à cause de sa soeur Nancy Mirando, via une émission de télé réalité / docu intitulée "Les Animaux Magiques", animée par l'excentrique Dr.Johnny Wilco/Jake Gyllenhaal (je reviendrais sur ce point plus tard).
On se retrouve projetés 10 ans plus tard dans les montagnes Coréennes en compagnie de la charmante Mija, jouée par Seo-Hyun Ahn. Cette petite orpheline file le parfait bonheur avec son SuperCochon, Okja, avec qui elle vit en compagnie d'un vieux fermier. Malheureusement, un beau jour, le tonton, en compagnie du Dr Wilco, vient récupérer Okja dans le but de l'emmener à New York car c'est le meilleur SuperCochon du programme de test de la société Mirando. Mija va donc fuguer pour tenter de retrouver son ami Okja à Séoul, puis New York.
Jusqu'ici tout se passe plutôt pas mal, on a le droit à une jolie photographie, des plans plutôt travaillés bien qu'un peu gratuits (notamment lorsque la jeune Mija arrive à Séoul et fait demi-tour dans les escaliers de la métropole, vêtue de sa parka rouge, allant à contre-courant de la marée humaine gris-bleutée, comme pour bien souligner son décalage avec le reste du monde).
Mais de fil en aiguille, le film va se montrer bourrée d'incohérences et le scénario, extrêmement premier degré, va se révéler d'une platitude improbable, multipliant les lieux communs avec en toile de fond une pseudo morale anti-capitaliste amenée de manière très hypocrite et maladroite...
Premièrement, le concept de l'émission "Les Animaux Magiques" est complètement abandonné passé les 15 premières minutes du film, et le personnage du Dr Wilco se révèle complètement inutile et unidimensionnel : on ne sait ni d'où il vient, ni qui il est... C'est en toute honneteté la première fois de ma petite vie cinéphile que je me suis retrouvé déçu par un personnage interpreté par Jake Gyllenhaal !
Ensuite, la manière dont est dépeinte les militants de l'ALF (Animal Liberation Front) me laisse perplexe. Ils sont tous très premier degré, tout de noir vêtus, jeunes et minces voire rachitiques, avec un look punk-rock réchauffé dont on se serait bien passé dans le contexte tellement l'ensemble est embarrassant. Ces personnages, très très creux et unidimensionnels, deviennent pourtant les protagonistes principaux pour l'heure et demie restante du film, releguant Mija au rang de personnage secondaire, voire carrément de prétexte (on les retrouve même après le générique, c'est dire à quel point Mija et ses sentiments sont anecdotiques dans cette histoire !). Complètement raté de ce point de vue, tant il y aurait eu à faire avec la jeune Mija qui se retrouve dépeinte comme une gamine bourrue et autiste, un peu facile...
Pour continuer avec les platitudes, on notera le fait que les thèmes de la condition animale sont bien abordées (d'un angle tantôt "welfariste", tantôt "anti-exploit"), mais personne, que ce soit la population ou les militants de l'ALF, ne semble rien trouver à redire quant au fait que les animaux soit crées en laboratoire, assez surprenant...
Quant aux incohérences, personne ne semble surpris qu'à la fin du film, plusieurs milliers de SuperCochons soient emmenés à l'abbattoir, alors même qu'il est clairement dit au début qu'un échantillon de quelques centaines seulement a été crée... c'est même le but du programme d'expérimentation de Lucy Mirando de valider la création d'autres animaux-éprouvette !
Aussi, la manière dont le message engagé de ce film est véhiculée me pose un gros problème d'éthique. Certaines scènes sont clairement mièvres et pas indispensable
Les ralentis très kitschs lorsque les militants de l'ALF se font interpeller par l'armée, comme pour dénoncer la fameuse "violence policière"... plus premier degré tu meurs!
où le fait que de nombreux placements de produits pour la marque Apple soient présents tout le long du film...
Un comble pour une oeuvre qui se la joue "anticapitaliste", mais ce n'est finalement pas si surprenant quand on se souvient que Netflix est derrière !
Mais hormis ces nombreux éléments qui donnent un méchant côté amateur au scénario et laissent un goût amer de propagande après le visionnage, il y'a d'autres choses qui ne jouent pas en la faveur d'Okja à mes yeux. Le rythme est bancal, si la première moitié est à peu près digeste, le reste du film passe dificillemment tant on enchaîne les longueurs : 2h pour en dire si peu, c'est clairement de la gourmandise. Les choix musicaux sont parfois inappropriés, parfois complètement à côté de la plaque
on se rappellera sans doute assez longtemps de la scène de la course-poursuite des deux camions tant le montage son dessert complètement l'image !
. Et enfin et surtout, les personnages sont cousus de fil blanc, et il est quasiment impossible de s'attacher à qui que ce soit durant ce film tant la psychologique des héros est premier degré, lisse, sans aucune subtilité.
Bref, pour résumer, Okja est un film qui était prometteur et dont le cadre aurait pu permettre quelque chose de grandiose (et les paysages coréens magnifiques n'y sont pas pour rien !). On aurait pu s'attendre à une fable poétique, authentique, avec toute la sensibilité de la jeune Mija au coeur d'un thème qui est actuel et universel. Bref, un film d'auteur rafraichissant. Mais malheureusement, après visionnage, on a l'impression de s'être mangé 2h de propagande pro-vegan grasse, avec quelques coupures pub pour Apple.
Pas sûr que ce film aurait autant fait parlé de lui si Netflix n'était pas derrière... En tout cas je ne risque pas de renouveller mon mois gratuit !