Le succès jamais démenti depuis plus de dix ans des Marvelleries à grand spectacle a eu le mérite de réveiller les expériences et les sensibilités locales et, quelques années après un sympathique ‘Garçon invisible’, l’Italie, terre plutôt accueillante pour le genre, livre un nouvel opus superhéroïque à dimension humaine, qui ressemble surtout à un de ces polars violents et crapoteux façon ‘Suburra’, et qui dénonce au passage l’état de délabrement des infrastructures publiques et des quartiers populaires de la péninsule et la prolifération d’une sous-culture de la célébrité instantanée : la petite frappe qui va hériter par accident de pouvoirs surhumains va tout d’abord s’en servir égoïstement, pour son propre intérêt, avant de se découvrir une propension à oeuvrer pour le bien, au contact d’une jeune femme retardée, convaincue qu’il est le héros de l’Anime japonais dont elle est fan. Soucieux de sa street-credibilty, ‘On l’appelle Jeeg robot’ ne recourt jamais à la moindre imagerie numérique et s’attache plutôt à assumer dans une certaine mesure l’héritage néoréaliste italien, afin de dépeindre au mieux ces zones gangrenées par le crime organisé et abandonnée par les autorités. Il n’empêche que Gabriele Mainetti sait faire preuve, dans le même temps, d’un respect appuyé envers la logique des Comics américains, dont il se colle docilement à la structure narrative de base avec cet anti-héros qui va progressivement virer de bord, et un méchant grimaçant et excessif, qui n’est pas sans évoquer le Joker : il en ressort qu’un film qui pouvait potentiellement faire preuve d’énormément d’humour noir et de mauvais esprit - on en a quelques exemples durant la première demi-heure - privilégie sur la durée une approche totalement Premier degré. Néanmoins, ‘On l’appelle Jeeg robot’ demeure assez singulier, ne serait-ce que par cet environnement culturel auquel on n’est pas vraiment habitué, et le conformisme des films de superhéros est aujourd’hui tel que toute variation sur ce thème, qui échapperait miraculeusement au hollywood-washing, reste bonne à prendre. Il y a quelques décennies, l’Italie était le moteur principal du cinéma populaire européen : des films comme ‘Jeeg robot’ apportent la preuve que si les moyens font défaut, la volonté et les idées sont toujours bien présents.