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    Laurence B
    Laurence B

    6 abonnés 50 critiques Suivre son activité

    2,0
    Publiée le 3 mars 2019
    J’atrendais Beaucoup de ce film mais j’ ai ete globalement déçue et pas convaincue au final. Très beaux décors et costumes une belle lumière de très bonnes actrices, mais un scénario creux avec des longueurs et des scènes et un langage assez vulgaire dans l’ensemble qui dessert le film à mon avis
    Jorik V
    Jorik V

    1 271 abonnés 1 952 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 21 décembre 2018
    Yorgos Lanthimos était un réalisateur prometteur. Et il confirme ici avec panache et fracas. Ce grec avait surpris son monde avec ses premiers films aux scénarios complètement azimutés de « Canine », où une famille élève ses enfants complètement coupés du monde en leur inculquant des noms pour chaque chose complètement opposés à leur réelle dénomination, à l’excellent « The Lobster », où des célibataires sont envoyés dans un hôtel et doivent trouver l’âme sœur sous peine d’être transformés en animal (!). Mais, aussi étranges soient-ils, ses films ont un sens et s’avèrent maîtrisés de bout en bout. Seul son précédent, le pédant et soporifique « Mise à mort du cerf sacré », nous avait laissé sur le bas-côté. Ici, le cinéaste grec désormais le plus connu à l’international monte encore en gamme et en budget et s’assagit en apparence avec un film d’époque haute couture. Plus accessible que ces précédents (il adapte pour la première fois un scénario qui n’est pas de son cru), son relatif conformisme n’en est pas moins de façade tant cette oeuvre bouscule les conventions du film en costumes et se place instantanément comme son meilleur film.

    Proche du chef-d’œuvre, « La Favorite » est un jeu de massacre méchamment déjanté où les joutes verbales et les scènes impertinentes s’enchaînent à un rythme effréné à tel point qu’on en redemande encore et encore. Loin, très loin du classique film d’époque, le réalisateur s’accapare une période de l’histoire anglaise et des personnages ayant réellement existé mais les broie à sa sauce, une mayonnaise absolument délicieuse faite de scènes incongrues, d’humour très noir voire loufoque (mais qui fait constamment mouche) et de propos osés et fortement féministes (les hommes en sont réduits à de simples figurants, hormis Nicholas Hoult plus pimpant… et féminin que jamais !). Il s’est entouré d’un trio d’actrices exceptionnelles pour un espèce de ménage à trois haut en couleurs dont on ne sait jamais vraiment s’il ressort du triangle amoureux lesbien ou d’une guerre de tranchées en corsets. Il serait d’ailleurs difficile de les départager tant elles excellent toutes les trois en (au choix) perfidie, malice, bêtise ou encore opportunisme. On connaissait déjà bien les qualités de Rachel Weisz (encore une fois royale) et Emma Stone (de mieux en mieux c’est dire…) mais c’est la moins connue Olivia Colman en reine malade et niaise qui emporte le morceau et les meilleures répliques. Si un prix d’interprétation commun existait aux Oscars, il faudrait le leur donner !

    Mais outre une histoire qui se suit avec appétit comme une sitcom de cinéma d’auteur en accéléré de (très) haute qualité et une interprétation de haut vol, « La Favorite » se distingue également par une direction artistique très raffinée où les décors et les costumes sont tout aussi soignés que les dialogues. De plus, Lanthimos, pour ne pas faire comme tout le monde mais sans que cela soit un choix pour se faire remarquer, filme ses personnages avec des plans alambiqués qui semblent les enfermer dans une espèce de sérénade, d’univers clos aux coins excessivement arrondis. Comme si on les observait par le biais d’un œil de bœuf, ajoutant avec ce regard déformé un aspect formel singulièrement bizarre. Les mouvements de caméra suivent les personnages et le réalisateur évite au maximum les champs/contrechamps, ce qui nous immerge dans ce cirque royal d’une drôle de manière. Mais d’une manière qu’on adore. Le film pourrait être de mauvais goût mais il ne l’est jamais, son originalité nous draguant à la perfection sans jamais tomber dans l’excès. Dommage que la fin soit si abrupte et laissé à l’appréciation de chacun bien qu’elle soit lourde de sens. Mais c’est un peu la marque de fabrique du réalisateur grec. Dans tous les cas ce sont deux heures exquises à écouter comme à regarder, on ne voit pas le temps passer et c’est confectionné avec un soin maniaque. « La Favorite » est un morceau de cinéma d’orfèvre dont il serait dommage de se priver tant le plaisir est intense.

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    Cinememories
    Cinememories

    482 abonnés 1 465 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 8 mars 2022
    Le cinéma de Yórgos Lánthimos a toujours divisé notamment, avec « Canine », « The Lobster » et « Mise à Mort du Cerf Sacré ». Il suggère une mise en scène très extravagante et décalée par rapport au contexte qu’il pose. Il n’hésite pas à ajouter des touches contemporaines, afin de contraster avec la rigidité d’une époque qui cloisonne toute possibilité d’évolution positive. Mais ce dernier essai surclasse de loin ses précédentes œuvres et il réussit un pari remarquable, en lâchant trois femmes dans un colisée de complaisance. Il aborde ainsi des relations manipulatrices dans la cour de la reine Anne, dernière héritière de la lignée des Stuart, où l’on y trouve le prolongement du récit de Josie Rourke, mais pas dans la même veine. Cette fois-ci, côté de la souveraineté légitime, il y aura bien du grabuge dans les hautes sphères du pouvoir, dans un moment fort de la guerre contre la France.

    Rythmé, modernisé, décalé et attractif dans son affiliation avec l’époque, le récit s’emploie à faire jouer les interprètes jusqu’à ce qu’on fasse le tour des phases, entre l’orgueil, la manipulation et le caprice. La reine Anne (Olivia Colman) s’installe aisément dans ce dernier point, mais il conviendra de ne pas baisser la garde face à sa noblesse. Elle dirige un peuple dans son lit, dans l’approximatif et entre deux courses d’animaux qui confortent la fragilité de sa position administrative. Quelque part, faire courir des sujets peut bien résonner sur le papier, mais elle ne s’y prend pas comme il le faut, faute d’éducation. C’est donc sa fidèle conseillère Lady Sarah (Rachel Weisz) qu’il incombe de prendre les responsabilités d’une femme qui manque à ses devoirs et qui manquent notamment de principes. Les règles du jeu sont alors rapidement établies et Sarah domine constamment la reine dans les échanges, du moins, jusqu’à ce qu’une vieille connaissance arrive afin de reconquérir un titre perdu. L’ancienne Lady Abigail Hill (Emma Stone), passe par toutes les cases pour pouvoir tutoyer les perruques les plus soignées et les dames les plus batifoleuses de la Cour.

    Elle trébuche avec panache, face à l’adversité. Au milieu du troupeau d’hommes, ces femmes parviennent à se faire une place dans les esprits, là où le mâle ne parvient pas à prendre des décisions sérieuses. Elles sont alors bien mises en avant afin de mieux cerner la condition féminine, que l’on décortique patiemment avec Emma Stone dans un premier acte très rigoureux. Et on y soulève la valeur de l’individualisme, là où chacun devra créer ses opportunités, quitte à tricher ou à s’alimenter de la cruauté pour parvenir à ses fins. Le travail du cadre est alors bien pensé, en tout temps. Les plusieurs utilisations d’angles arrondis insistent sur le climat ou le décor qui oppresse les protagonistes dans le champ. De plus, la richesse de l’œuvre réside également dans ses teintes lumineuses, au plus proche du naturel. On jubile donc dans ce cadre peu convivial, car similaire à des barreaux d’une prison, dépeignant ainsi toute la rivalité et la fausse complicité des personnages. On flirte d’ailleurs très souvent avec l’incertitude, ce qui donne une lecture pragmatique au récit qui enchaîne les trahisons.

    Les petites imperfections et la flexibilité de la mise en scène du cinéaste grec permettent ainsi à « La Favorite » de s’envoler. Sans nul doute le film le plus accessible de la filmographie de Lánthimos, ce dernier n’a pas hésité à briser des règles, comme pour ses personnages, afin de gagner en courtoisie et en empathie. Le résultat bluffe par sa simplicité dans le postulat de base, mais c’est dans le tourment des femmes qui recherchent sans cesse la reconnaissance et le pouvoir qu’il y a matière à cogiter et à divertir. Et bien que la morale reste peu surprenante et parfois mal amenée, nous ne cesseront d’affirmer haut et fort qu’il existe une hiérarchie. Il est possible de la bousculer, mais finalement, l’équilibre n’est jamais rompu. Le lapin sera toujours sous la botte de quelqu’un, jusqu’à ce qu’elle puisse courir et prendre l’élan nécessaire pour exister.
    vidalger
    vidalger

    321 abonnés 1 250 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 6 mars 2019
    Après avoir détesté The Lobster, j’avais évité Mise à Mort du Cerf Sacré et n’ai consenti à aller voir ce film en costumes sur la cour d’Angleterre et réalisé par un Grec, que sur l’accumulation de nominations aux Oscars. Bien m’en a pris, ce film est une leçon de cinéma. Sans s’encombrer de réalisme ni dans le scénario, ni dans les dialogues ou les costumes, le réalisateur réussit à nous captiver par une sombre histoire mêlant pouvoir, ambition et séduction, filmée quasiment en lumière naturelle, et parfois à la lueur de chandelles, enveloppée d’une musique mêlant habilement Purcell et Elton John, Messiaen ou Vivaldi. La réussite tient beaucoup à la qualité des trois actrices composant le trio de la reine Anne (l’oscarisée Olivia Colman), de sa favorite Lady Sarah (la très belle Rachel Weisz), et de l’intrigante Abigaïl (la très charmante Emma Stone), toutes trois au sommet de leur art. L’humour toujours présent, le ridicule de la galerie des hommes, l’extravagance d’une cour qui entre courses de canard et une guerre lointaine, ne pense qu’à la bagatelle portent ce film d’époque à un niveau sans doute éloigné de la vérité historique d’un Barry Lindon (par exemple) mais qui comble le spectateur peu familier de la guerre de succession d’Espagne au XVIII ème siècle.
    Frédéric M.
    Frédéric M.

    186 abonnés 1 846 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 6 février 2024
    Encore une fois Emma Stone porte le film et demeure bluffant. L'intrigue historique est captivante, et reflete bien un aspect politique jamais abordé à toutes les époques.
    Vinz1
    Vinz1

    179 abonnés 2 432 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 8 février 2024
    Très bon film sur un personnage historique assez méconnu, celui d’Anne d'Angleterre, femme triste et malade, étant sur le trône britannique depuis la mort de son mari. Ici, elle assistera à la partie d’échecs que se jouent deux favorites qui essaient de s’attirer ses bonnes grâces : Sarah, duchesse de Malborough (formidable Rachel Weisz) et amie d’enfance de la reine et Abigail (remarquable Emma Stone), une lointaine cousine venue à la cour pour un petit emploi et plus si affinités ! Jeux de dupes, mensonges, retournements de situation et stratagèmes seront alors de mise entre ces deux femmes prêtes à tout pour arriver à leurs fins. Et la Reine comme les spectateurs subiront toutes ces manigances ! Nanti d’acteurs géniaux (la reine est également superbe), décors et costumes magnifiques faisant penser à « Barry Lyndon », ce film se jouant en véritable huis clos saura nous surprendre jusqu’à sa fin peut-être un peu abrupte pouvant rappeler certains métrages de Claude Chabrol, mais c’est bien là son moindre défaut !
    SebLefr3nch
    SebLefr3nch

    187 abonnés 687 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 7 février 2019
    La reine Anne d'Angleterre, dernière des Stuart, est peu connue dans l'histoire. Ici, elle est l'élément principal car, selon les historiens, elle était facilement manipulable. C'est étonnant qu'il n'existe pas plus de films sur son personnage car il y a de quoi imaginer bien des péripéties. Et c'est ce que réussit très bien "The Favorite", une reine manipulée par des femmes qui lui tournent autour, qui souhaitent tirer avantages de sa naïveté et qui n'hésitent pas à mettre en place des stratagèmes pour arriver à leurs fins. C'est tellement bien ficelé que ça en devient passionnant. La réalisation, très inattendue pour un film en costumes, enchaine des plans à très larges focales pour ne pas perdre un m2 des décors. C'est étonnant mais elle donne un style propre au film beaucoup moins académique et on adhère. La photographie est impressionnante car il y a beaucoup de scènes éclairées au feu de cheminée ou à la bougie ce qui donne un effet confiné et à se demander ce qu'il se cache dans le noir. Les contre-jours sont aussi très présents. La direction artistique nous étonne tout autant car elle est à la fois fidèle à l'époque tout en s'accordant des libertés extravagantes comme avec la séquence du bal. Le trio d'actrices est excellent. L'alchimie fonctionne à merveille et c'est un régal de les voir se donner la réplique. Le son est également très travailler pour accentuer une atmosphère malsaine. "The Favorite" est un film vraiment étonnant qui séduit par ses libertés loin du classicisme du film en costume, qui le sauvent et le portent haut. On n'est pas prêt de l'oublier.
    T-Tiff
    T-Tiff

    93 abonnés 1 185 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 6 février 2024
    Yórgos Lánthimos réalise un film historique avec "La Favorite", racontant comment Abigail Hill a réussi à remplacer Lady Sarah comme favorite de la reine Anne d'Angleterre. C'est donc un trio de femme qui se retrouve au premier plan, formé par Olivia Colman (Oscar de la meilleure actrice pour le rôle), Rachel Weisz (nommée à l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle), et Emma Stone (également nommée à l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle). Ce trio porte magnifiquement bien ce film, qui porte beaucoup sur les relations de domination, avec des rapports de force qui vont sans cesse évoluer pendant toute la durée du long-métrage. Parfois un peu caricatural dans sa représentation de la noblesse de la fin du XVIIème siècle, le film semble parfois prendre trop d'aise avec la réalité historique. Par ailleurs, certains éléments de mise en scène, comme l'objectif grand angle, sont assez stériles. Yórgos Lánthimos signe tout de même un film plus accessible dans sa filmographie avec "La Favorite", on appréciera particulièrement suivre le formidable trio féminin.
    tuco-ramirez
    tuco-ramirez

    133 abonnés 1 625 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 22 mars 2019
    Yorgos Lanthimos met en boite son premier film accessible après des films d’auteurs hyper pointus tous primés à Cannes quoi que très absconds. Un film en costume quoi de mieux pour toucher le grand public. On pourrait penser cela, mais le réalisateur grec ne se départi pas, même lorsqu’il cotoie le cinéma de genre comme ici, d’un regard radical et décalé. Il revisite et dépoussière sérieusement le genre avec ce film ; même si on pourrait le taxer de quelques boursufflures stylistiques. Boursufflures critiquées par certains mais si utiles ; comme l’utilisation fréquentes du Fish-Eye (cher à Kubrick) pointant la vacuité du pouvoir, l’isolement des puissants via un œil voyeuriste extérieur bien conscient des faiblesses du pouvoir. Et c’est toujours autant d’actualité.
    Et l’histoire là dedans. "La Favorite" repose sur un socle historique solide en mettant en scène les rapports entre la reine Anne (1695-1714, montée sur le trône en 1702) avec sa Première dame, Sarah Churchill, dont elle était très proche, mais avec laquelle elle avait un différend politique. Le film invente en revanche le personnage d’Abigaïl Hill qui va mettre le feu aux poudres entre elles, alors que la guerre fait rage entre l’Angleterre, l’Espagne et la France. Issue d’une famille aristocratique déchue, Abigaïl Hill (Emma Stone) est introduite par Sarah Churchill (Rachel Weisz), sa cousine, comme servante à la cour de la reine Anne (Olivia Colman). Alors que la préférée de la souveraine gère le pays à sa place en raison d’une santé fragile, Abigaïl s’attire les faveurs d’Anne au détriment de ce qui devient sa rivale, en influençant à son tour la reine.
    Et qu’à voulu monter Lanthimos via cette histoire ancienne ; il le dit en interview : « Ce qui m’intéressait, c’était la manière dont le comportement d’une poignée de gens peut transformer le déroulement d’une guerre et influer sur le destin d’un pays », explique le réalisateur pour qui les choses ne sont guère différentes aujourd’hui. À ce marivaudage cynique et glaçant, dont les hommes ont été exclus, Yórgos Lánthimos, ajoute sa touche personnelle, mélange de grotesque et de noirceur absolu.
    La cour emperruquée et poudrée à l’excès passe son temps dans des distractions aussi vaines qu’absurdes, comme une course de canards ou un lancer d’oranges sur cible vivante ; les domestiques y sont aussi cruels que les puissants ; le premier ministre, Lord Godolphin, et son principal opposant, parfaitement ridicules. Et plus largement, c’est le rôle ce que l’on apelle aujourd’hui les spin doctor qui est l’un des cœurs du film ; le film étant si riche de thématique.
    La relation dominant – dominé dans un ballet perpétuel pour avoir les faverus de la Reine est glaçant. Et jusqu’à la scène finale ou la nouvelle favorite devient le lapin de la Reine ; elle se fait écraser alors qu’elle pensait avoir pris le pouvoir par un même geste d’écrasement et de domination. Et donc à la fin tout finit par reprendre sa place, comme si c’était immuable.
    Et sur Culturopoing : « C’est d’abord un diptyque monstrueux que le film donne à voir, en faisant le portrait de la reine Anne, personnage sans envergure qui régna en Angleterre de 1702 à 1714, et de sa favorite Lady Sarah, respectivement interprétées par Olivia Colman et Rachel Weisz. Cette amitié est attestée par les historiens mais les scénaristes ont avoué avoir pris une certaine liberté vis-à-vis des faits réels. La reine est dépeinte de manière grotesque : sans jugement, geignarde, presque répugnante, elle suscite d’abord le dégoût du spectateur, consterné de voir un personnage si mal assorti à sa fonction. La multiplication des gros plans sur le visage boudeur de la reine ainsi que son maquillage outrancier contribuent à faire d’elle une marionnette sans épaisseur que semble manipuler Lady Sarah. Pour autant, le film ne tombe pas dans un manichéisme facile et propose une représentation contrastée de ce couple étonnant. Le talent de Yórgos Lánthimos est d’autant plus manifeste que ce dernier parvient progressivement à adoucir le regard du spectateur sur un personnage qui a d’abord fait office de repoussoir. Si la reine reste foncièrement ridicule, elle gagne en complexité et devient touchante dans son malheur et sa mélancolie.
    Ce mélange des registres est également présent dans la peinture de la cour, tout à la fois satire impitoyable des courtisans et méditation empreinte de gravité sur la politique. Les divertissements de cour contrastent avec la situation difficile du pays, épuisé par la guerre contre la France et par la révolte des paysans surtaxés. Une des premières séquences du film, particulièrement brillante, met en scène une course de canards organisée par les Grands du royaume au sein du château. Filmée au ralenti et en contre-plongée, la séquence met en lumière la décadence et la puérilité des aristocrates. Par un retournement baroque, ce sont les courtisans qui font figure d’animaux sauvages en regard de la docilité des animaux. Ainsi, l’enfantillage des courtisans n’a d’égal que leur inconscience.
    Mais la véritable guerre, celle qui oppose Lady Sarah à sa cousine Abigail Hill, a lieu dans l’enceinte même du château, où les deux femmes se disputent les faveurs de la reine. C’est certainement l’aspect le plus passionnant du film, celui qui consiste à décliner au féminin une réflexion sur l’ambition, l’opportunisme, et les rapports de domination. Dans cette course au pouvoir, la difficulté consiste à savoir rester à sa place tout en essayant de mettre tout en œuvre pour obtenir la confiance de la souveraine. Monter dans les échelons de la société de cour s’accompagne paradoxalement pour ces femmes d’une forme d’abaissement, comme si la quête de la gloire entraînait aussi le sacrifice des valeurs morales. C’est un jeu pervers où tous les coups sont permis mais où l’on ne peut gagner sur tous les tableaux.

    La représentation de la course au pouvoir chez Lady Sarah et sa lointaine cousine s’accompagne d’une virilisation des héroïnes à travers les vêtements, l’attitude et la parole. Maîtresse-femme, la confidente de la reine sait manier les armes avec dextérité, se plaît à s’habiller en homme quand les circonstances l’autorisent, et fait montre d’une éloquence exceptionnelle. Les scènes où celle-ci mouche Lord Harley, alors Premier ministre du royaume, reviennent comme un leit-motiv comique, et soulignent l’impuissance de ce dernier. Si les femmes sont virilisées, de même, les hommes sont systématiquement féminisés et leurs perruques abondantes, leurs parures et leur maquillage extravagant font signe vers un retournement des valeurs, une inversion de l’ordre patriarcal. Le réalisateur se plaît aussi à dissimuler l’obscénité des personnages sous leurs costumes, infamie qui réapparaît ici et là involontairement. Yórgos Lánthimos parsème son film d’images métaphoriques de la souillure et de la tâche – une robe pleine de boue, un visage défiguré, une giclée de sang-, comme pour dévoiler les impostures. Il organise un fascinant jeu de va-et-vient entre le pur et l’impur. La sexualité subit le même traitement, dévoilant les secrets d’alcôve, le scabreux derrière la porte.
    La Favorite rend hommage à cet autre cinéaste conceptuel qu’est Peter Greenaway, avec un goût tout aussi prononcé pour la trivialité et le grotesque que les beaux atours peinent à dissimuler. Derrière la beauté de ses habits, l’individu est bien sale. Aussi l’ombre de Meurtre dans un jardin anglais ne cesse de roder autour de cette autre demeure. Plus que de le revisiter, Lanthimos lui applique la stylisation de sa propre mise en scène, à la fois élégante et coupante, où la déformation du grand angle sert les vertiges de la perception. Yórgos Lánthimos excelle à utiliser toutes les ressources du langage cinématographique pour représenter ses personnages. Il travaille notamment leur rapport à l’espace pour symboliser leur état, leur fragilité ou leurs aspirations. Le réalisateur se plaît à filmer de manière répétée les allées et venues des personnages dans une galerie d’une longueur qui semble infinie, comme pour signaler la lourdeur du protocole et des usages de cour. Les pièces immenses dans lesquelles évolue la souveraine semblent également révélatrices d’une certaine incompétence. L’ouverture du film est à cet égard éloquente. On y découvre la reine de dos, dans une vaste pièce lambrissée. La longueur de sa traîne pourrait ici matérialiser la charge que représente l’exercice du pouvoir. Dans cette séquence d’ouverture, le montage alterné nous fait aussi découvrir le personnage d’Emma Stone, coincée entre les passagers trop nombreux d’une diligence. L’exiguïté du véhicule et la promiscuité qu’il impose tendent ici à suggérer la déchéance sociale de la jeune femme, bloquée au sens propre comme au sens figuré.

    Si l’on peut être frappé par la perfidie des héroïnes de La Favorite, celles-ci n’agissent pas pour autant gratuitement ou par pure perversion, contrairement aux personnages de libertins ou de roués qu’on retrouve chez Choderlos de Laclos. Le tempérament froid et calculateur du personnage incarné par Emma Stone trouve d’une certaine manière son explication dans la mention d’un passé traumatique. C’est parce qu’elle a vécu l’horreur de la chute, qu’elle a subi l’inconséquence d’un père endetté et peu consciencieux qu’elle intrigue. Sa connaissance intime de la brutalité masculine, d’autant plus usuelle que les hommes sont nobles, témoigne en outre d’une expérience et d’une lucidité exemplaires. Ainsi, quand l’opportunisme dicte aux héroïnes leur attitude, c’est davantage par pragmatisme que par noirceur. La médaille a d’ailleurs son revers et la puissance de ces femmes semble par moments bien précaire. En cela, ces favorites, quoique dissemblables, frappent surtout par leur humanité tant elles ont partagent la quête angoissée d’une autonomie, d’une indépendance utopique »

    Un film à voir plusieurs fois pour capter toute la richesse des situations et du propos.
    tout-un-cinema.blogspot.com
    shindu77
    shindu77

    91 abonnés 1 605 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 3 mars 2020
    Le film est intéressant et vaut surtout pour son trio d'actrices qui sont excellentes dans leur rôle respectif.
    L'histoire est bonne et le film est bien réalisé dans l'ensemble.
    floramon
    floramon

    81 abonnés 1 423 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 23 mars 2020
    je ne suis pas trop film d'époque en général mais celui ci j'ai beaucoup apprécié, l'histoire n'est pas ennuyante et il se passe beaucoup de chose , en plus de cela on en apprend plus historiquement, j'ai été convaincu.
    Selingues G
    Selingues G

    73 abonnés 956 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 6 août 2019
    Porté par un superbe trio d'actrice, la favorite a permis la consécration de l'actrice d'Olivia Colman pour son rôle de la Queen Anne. Comme expliqué ci-dessus, le film repose surtout sur le jeu des actrices avec l'affrontement entre les deux favorites (on peut même aller plus loin en imaginant un affrontement entre deux générations d'actrices se passant le relais).

    Perturbant à certains moments, cette tragédie démontre à quel point il était important d'avoir les bonnes grasses de la cour.
    Pour aider à nous immerger dans cette ambiance, les costumes et les décors sont sublimes. Emma Stone et Rachel Weisz sont parfaites.

    Le réalisateur de Lobster est très fort quand il s'agit de travailler sur les sentiments mais l'inconstance du propos n'aide pas le spectateur.
    QuelquesFilms.fr
    QuelquesFilms.fr

    268 abonnés 1 639 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 19 février 2019
    Au XVIIIe siècle, à la cour d'Angleterre, un cruel jeu de pouvoir, de désir et de manipulation entre la reine Anne, sa favorite officielle et une jeune arriviste. On est quelque part entre "Meurtre dans un jardin anglais" et "Barry Lyndon", en mode féminin saphique. Décors feutrés, verbe aiguisé, férocité parfois bien crue. C'est peut-être le film le moins "barré" de Lánthimos. Il n'en reste pas moins baroque et sarcastique. Souvent jubilatoire. La lumière du film est superbe. D'autres choix esthétiques sont plus discutables (le grand angle déformant). En termes de récit, le dénouement n'est pas forcément à la hauteur de ce qui précède. Mais l'ensemble reste d'une qualité piquante et doit beaucoup, aussi, à la performance des trois actrices principales (Olivia Colman, Rachel Weisz, Emma Stone).
    Bertie Quincampoix
    Bertie Quincampoix

    103 abonnés 1 830 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 13 mars 2021
    Après les très remarqués The lobster et Mise à mort du cerf sacré, Yórgos Lánthimos semblait se laisser tenter par un sujet plus classique avec ce long-métrage inspiré de la vie d’Anne, reine de Grande-Bretagne de 1707 à 1714. Avec ses faux-airs de pilote de série, ce long-métrage raconte les stratégies mises en place par l’aréopage féminin d’une monarque pour obtenir ses faveurs, et donc sa protection et une partie de son pouvoir. Dans la continuité des précédents opus du cinéaste grec, le cynisme et le pessimisme quant à la nature profonde des êtres humains irriguent ce long-métrage rythmé, qui imagine un XVIIIème au débit de parole aussi important qu’aujourd’hui. Réalisé d’une main de maître par un Yórgos Lánthimos inspiré, il nous plonge au cœur d’un jeu de pouvoir et d’influence qui prouve qu’en termes de basses manœuvres politiques, les femmes n’ont rien à envier à leurs homologues masculins. Un magnifique trio d’actrices (Olivia Colman, Emma Stone, Rachel Weisz).
    Rourkewhite
    Rourkewhite

    65 abonnés 967 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 23 avril 2020
    Bénéficiant d'un casting de luxe délivrant d'excellentes interprétations, la nouvelle folie de Lanthimos s'avère finalement plutôt sobre. Pas que ce soit convenu, la maestria du réalisateur suffisant à le rendre particulier et le venin d'un scénario vicieux se chargeant d'assurer le spectacle, mais il s'agit assurément d'une oeuvre facilement lisible et accessible. On le regretterait presque tant le matériau de base invite à la folie narrative, si chère à Lanthimos! C'est donc quelque peu assagi que le réalisateur nous délivre un film qui séduit plus par ses qualités techniques (partis pris dans la lumière, costumes et décors impressionnants, réalisation virtuose,...) que scénaristiques.
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