C’est du belge et on dirait même plus du féminin! Même pas le temps de souffler après les fêtes car, dès le 4 janvier, c’est un détonnant « Girl Band » qui débarquera dans les salles. Et une chose est sûre: quand il s’agit de faire des secrets et des cachotteries, Jenifer (oui, oui, la chanteuse qui joue désormais la comédie), Tania Garbarski, Camille Chamoux et Stéphanie Crayencour ne font pas dans la dentelle. Encore plus quand un mariage est en jeu. Messieurs, restez planqués ou alors, il en ira de vos risques et périls… de vos zygomatiques aussi!
Yaël (Stéphanie Crayencour) est aux anges, d’ici quelques semaines, elle se mariera avec l’homme de sa vie, Maxime (Arié Elmaleh). Bon, c’est vrai, il n’est pas facile tous les jours de vivre avec un homme qui se réfugie dans le travail et qui (se) refuse à la toucher depuis une éternité. Ce n’est pas faute d’avoir essayé d’allumer (au propre mais surtout au figuré) sa flamme et le reste. Mais bon, le coeur a ses raisons et Yaël prend son mal (et sa libido) en patience. Sauf que…
… Yaël a trois cousines. Toutes sont différentes mais possède ce même tempérament de feu qui semble animer la famille. Et toutes sont à des moments différents de leur vie. Laura (une Jenifer en retenue), l’avocate et la plus rigoureuse du groupe, est en pleine procédure de divorce. Eve (la si naturelle Camille Chamoux, notre actrice coup de coeur de 2016 avec L’invitation mais aussi Maman a tort) teste les limites de son mari trop parfait et trop serviable (Stéphane Debac). Enfin, Anouch (pepsodante en diable(sse) Tania Garbarski), la plus âgée du groupe, retrouve une seconde jeunesse dans sa perpétuelle recherche du grand amour (mais, attention, pour entrer dans sa vie, il y a un parcours du combattant rigoureux à franchir!). Alors, quand ces trois-là se rendent compte que Maxime trompe Yaël de manière totalement inattendue, les tractations les mènent vite à jurer « Faut pas lui dire ». Et si un secret n’est jamais facile à retenir (surtout que les cousines ont la langue bien pendue), c’est encore plus le cas quand cette situation génère quiproquo sur quiproquo. Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que le grand amour de jeunesse de Yaël refait surface. Avec la grande ambition de reconquérir celle-ci.
C’est avec ce propos vaudevillesque et en jouant sur le proverbe « Si tu aimes la banane, ne mange pas la papaye » que Solange Cicurel continue de faire ses armes dans le monde du Septième Art. Son nom ne vous dit peut-être rien, et c’est bien normal. Initialement avocate au Barreau de Bruxelles (ce qui lui a sans doute donné des idées pour étoffer le rôle offert à Jenifer), l’apprentie-réalisatrice a fait ses premiers pas, il y a cinq ans avec le court-métrage « Einstein est un réfugié ». Un film de moins de vingt minutes qui a joui de nombreuses sélections dans des festivals. De quoi mettre de la suite dans les idées de la Belge qui a eu à coeur de passer au long-métrage. Avec Faut pas lui dire, donc.
Sur l’affiche, les sourires des quatre filles parlent pour elles et enrobent de sympathie ce film choral et féminin. Le casting est d’enfer mais ne crions pas victoire trop vite. Tout reste à faire pour convaincre le spectateur. Mais la fraîcheur émerge d’emblée et imprègne la caméra de Solange Cicurel, portée par l’agréable BO concoctée par Emilie Gassin et Benjamin Violet avec l’appui de Marc Pinilla (de Suarez) et la délicatesse d’Alice on the Roof, présente avec quelques un de ses tubes. La jeune réalisatrice n’a pas choisi de mettre en scène des cousines par hasard et cette relation épargnant la déférence permet aux quatre filles de former une belle bande de filles. Un girl power à toute épreuve. Y compris le déjà-vu? Il semblerait car, sans trouver le pitch le plus dingue du cinéma belge (ça tombe bien, ce n’est pas ce qu’on lui demandait), Solange Cicurel impose une vraie patte et une certaine audace. Très habile, forcément, dans les scènes « juridiques » (avec une hilarante et inattendue scène de plaidoirie), l’avocate-réalisatrice s’impose dans l’art du teambuilding. Et si Jenifer a un peu de mal à se mettre dans le bain (on la sent de plus en plus à l’aise et détendue au fil du film), l’ancienne gagnante de la Star Ac’ ne démérite pas, loin de là, dans le festival dont Tania Garbarski et Camille Chamoux sont les organisatrices délirantes. Du côté de la mariée, on redécouvre la trop sous-exploitée Stéphanie Crayencour, en nuance et en justesse, trop chou et rayonnante.
Mais, si les femmes viennent de Vénus, il est aussi un peu question de la planète Mars. Et dans ce chassé-croisé choral, Arié Elmaleh trouve judicieusement sa place dans un rôle dual et pas forcément évident et prouve qu’il peut sortir de l’ombre encombrante de son grand-frère. Pour le reste, les apparitions masculines de Charlie Dupont (qui, contre toute attente, n’incarne pas le mari de Tania Garbarski mais bien l’ex de Jenifer!), Stéphane Debac (trop rare sur grand écran malgré tout son potentiel), Benjamin Bellecour ou encore Fabrizio Rongione et Laurent Capelluto (débordant de tendresse, il fait une nouvelle fois forte impression), chacun dans des genres très différents, font mouche… bien aidés par la vision de Cicurel.
L’avocate, sans se servir de la caméra pour se faire juge, joue la finesse et évite de prendre uniquement le parti des femmes. Et entre Vénus et Mars, Solange fait des allers-retours, marquant son empathie pour ses héros qu’ils soient masculins ou féminins. C’est cet amour-là qui rend Faut pas lui dire plus qu’attachant et en fait un film finalement mixte devant lequel les filles prendront leur pied sans pour autant que les hommes ne soient largués. On en attendait pas tant, et c’est tant mieux. Faut pas lui dire, c’est le bon remède pour oublier 2016 et faire une entrée fracassante en 2017. Déridante par-dessus tout, à voir assez vite avant que ce quatuor d’actrices n’ait vraiment crevé l’écran.