Diane a les yeux cernés, la bouche est fendue, et de sa clinique psychiatrique, elle se tape de souffrance le front sur une vitre. La désespérance de cette mère est immédiatement perceptible et ne cesse de poursuivre l'héroïne, décidée à retrouver les chauffards de son fils et de s'en venger. Le récit se passe entre la Suisse et Evian, avec pour figure centrale un lac magnifique, qui, comme le rappelle un protagoniste, peut s'avérer des plus dangereux en dépit de son apparence calme. La métaphore est immense : qui, entre cette esthéticienne bourgeoise et cette mère effondrée est capable du pire ? Ce "Moka" ne figurera pas dans les grands films de l'année. Pour autant, l'idée est bonne. Elle est surtout formidablement portée par deux actrices magnifiques, Emmanuelle Devos, comme d'habitude, intègre et douloureuse, et Nathalie Baye, convaincante et charismatique. C'est un film d'actrices, et ce qui en fait la qualité. La difficulté principale réside dans le scénario. Cousu de fils blancs, le film s'enfonce dans une série de hasards qui n'en sont pas, donnant à la narration un air de mauvais téléfilm policier. Le réalisateur se plaît surtout à filmer des histoires policières. Il aurait dû au contraire, moins s'attarder sur l'énigme, que le portrait de cette Diane, dévorée par un deuil impossible à porter. Ainsi, malgré le talent indéniable de Devos, la cinéaste passe à côté de son sujet, précipitant son œuvre dans une intrigue psychologique, bancale et souvent invraisemblable. Néanmoins, "Moka" vaut le détour pour Devos et Baye qui font de ce petit film, un exemple de mise en scène.