Jacques Audiard est pour nous une valeur sûre depuis "Un prophète". Nous étions curieuses de voir un western fait par une équipe de Frenchies, tourné en Espagne avec des acteurs américains, qui a remporté un Lion d'argent à la Mostra de Venise.
En sortant de la salle, il y avait comme une petite déception, mais comme la nuit porte conseil, nous avons révisé notre jugement et les images fortes ont effacé l'impression de longueur.
Selon Audiard, "c'est un voyage de deux vieux enfants" marqués par leur enfance, deux bouseux, que ce périple va transformer. Les frères sont magnifiquement interprétés par Joaquin Phoenix et John C. Reilly (qui nous a le plus surprises par un jeu plein de subtilité). Lui, le grand frère, le personnage le plus attachant qui s'endort avec un châle qu'on lui a offert, objet d'un rituel sensuel. Lorsqu'ils rejoignent les deux hommes qu'ils poursuivent, un détective (Jake Gyllenhall) et un chimiste (Riz Ahmed), des hommes éduqués et instruits, le cours de leur traque va changer.
Bien que, au départ, tout oppose les chasseurs et leurs cibles, ce quatuor d'hommes va finalement se lier pour un projet commun qui pourrait se transformer en idéal de société. De magnifiques paysages dignes des meilleurs westerns américains et de nombreux rebondissements font passer quelques longueurs. Il y a aussi les beaux plans rapprochés que nous aimons chez Audiard et le talent du directeur de la photographie, Benoit Debie.
Les scènes humouristiques, comme lorsque les frères découvrent les acquis de la vie moderne (la brosse à dents ou la chasse d'eau) et des séquences touchantes, comme la rencontre avec la prostituée, alternent avec des scènes de grande violence. On tue sans état d'âme mais on pleure la mort de son cheval !
En revanche, sans trop dévoiler la fin, le Happy End donne davantage une allure de fable à la cavalcade de deux tueurs à gages. Ils rangèrent leurs armes et vécurent heureux... On retrouve l'Amérique dans sa brutalité, celle des westerns classiques où quelques individus pouvaient tuer en toute impunité car, de plus, il n'y a ici aucun représentant de la Loi.
A travers ce film, la banalisation de la violence nous rappelle que le culte des armes à feu est toujours intact aujourd'hui. Mais on se laisse aussi porter par de belles images et une histoire finalement touchante.
Donc un bon film à voir ...
http://www.matchingpoints.fr/2018/09/27/cinema-les-freres-sisters/