La magnifique adaption filmique de Jean-Jacques Annaud "Le Nom de la Rose" (avec sa géniale affiche) regroupe et reprend quasiment à lui seul presque tous les marqueurs du roman qui révèle les plus grandes réussites de la Littérature, toutes époques confondues.Tout d'abord, il me faut directement applaudir ce scénario qui est tout bonnement exceptionnel, riche et ultra documenté. Reprendre la trame narrative écrite par Umberto Eco, l'un des plus grand chefs-d'oeuvre de tous les temps, d'un genre considéré comme mineur (polar médiéval) n'était pas chose aisée et le résultat est ici prodigieux. Prouesse d'autant plus grande à réaliser quand on sait à quel point le bouquin est d'une ambition et d'une audace folle dans la volonté de traîter un grand nombre de thèmes. Car comme dans le roman l'intrigue s'inscrit en plein dans le ventre de l'obscurantisme religieux et doctrinal, à l'époque des grandes hérésies et du plein-pouvoir de l'inquisition, du temps des papes avigonais. On retrouve donc dans le film beaucoup de gageures propres au livre comme des réflexions sur l'ordre philisophique, sur le rôle de l'écriture ou du rire, des dissertations sur le savoir, le fanatisme, la tolérance, la révolte des classes populaires, et sur les liens ambigues qui existent entre le Pouvoir, la Possession et le savoir. Aucune éventuelle apologie ici, de partialité encore moins. Juste une volonté, je pense, de souligner, de se concentrer et de nous dépeindre la face sombre, les limites et conséquences de l'opinion sectaire notoire du milieu et de l'époque (on pense à le pensée unique intronisée par l'Inquisition romaine) (avec quand même ce qu'il faut en faire pour nous offrir une fiction historique prenante à l'évidence) avec une interprétation forcement toujours relative, subjective et différenciable en fonction de l'individu. Et c'est dans notre interprétation personnelle où on peut retrouver de la partialité d'ailleurs. Bref, c'est dans le fait de retrouver cette densité narrative dans un seul et unique film (même s'il est assez long) qui est impressionnant. Et comme dans le style d'Eco la mise en scène, l'humour et la qualité d'écriture au sens large du thème y sont finement ciselés, doctes et truffés de clins d'oeil plus ou moins perceptibles selon la culture du spéctateur. Tout cela nous conduit, à côté d'une ambiance d'époque magnifiquement retranscrite (qu'elle soit dans la fidélité des dialogues, en passant par les décors, les costumes et même le jeu d'acteur) à une enquête et une trame pleine de mysticisme, de suspense et de mystère. Un peu à la manière d'une certaine illustre série de HBO, complots, rancœurs, luttes d'influence, énigmes, pièges politiques, coups de théâtre, tout y est. Et c'est ça qui est vraiment prenant car il y a tout ce qu'il faut pour nous faire un excellent polar enrichissant, captivant et donc aucunement vain. L'un des meilleurs films hexagonal (et globalement européen) de tous les temps sans doute. Vous avez dit "Chef-d'oeuvre" ?