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Flavien Poncet
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4,0
Publiée le 30 mai 2008
Défendu comme la première fiction Nénéts, «Seitsemän laulua tundralta» (Finlande, 1999) d’Anastasia Lapsui et Marrku Lemusskhalio se déroule sur les soixante-dix années de pouvoir soviétique en Russie. Un conte pour chaque décennie témoigne du processus d’acculturation forcée menée par les soviets auprès des Nénéts. Culture à part entière, ce groupe d’autochtones est éclairée selon deux angles : anthropologique et fictionnelle. Chaque chant apporte une pierre à l’édifice identitaire du peuple. Bien que cette identité reste instable à cause du processus de déculturation mené par les soviets, Lapsui et Lemusskhalio réussissent à capter une image relativement nette des Nénéts. Peuple de la Sibérie, les Nénéts vivent selon leur propre régime culturel. A cette «stabilité» culturelle vient s’incruster l’égalisation forcée par les soviets. Contraints, obligés, les Nénéts se ploient sous le diktat stalinien jusqu’à ce que les enfants nénéts soient menés de force à l’école publique. Articulé en chants et non en tableaux, le film dégage une poésie lyrique et crépusculaire, le son soprano d’un requiem. Ouvert sur un sacrifice et clos sur un bébé gémissant, le film dessine la courbe d’un positivisme lumineux. Entre-cela, Lénine est un dieu pour les Nénéts, une femme perd son honneur, les terres Nénéts sont envahies puis désertées par les soviets, comme un tsunami gargantuesque qui dévaste un champ pour n’y laisser que les roseaux rompus. La force des deux cinéastes repose sur la mesure de leur art. Sans élégie gratuite ni déploration réactionnaire, Laspui trace les contours du peuple Nénéts tandis que Lemusskhalio instille la poésie gracieuse de son cinéma. Cette première fiction nénéts dégage une chaleur, la grâce d’un psaume, la douceur d’une mélopée. Sans picaresque colonialiste, ce regard nénéts (Lapsui est nénéts d’origine) sur eux-mêmes atteint par son récit délicat une justesse de regard.