Le premier volet de Robert Stromberg épousait une certaine noirceur, tout en restant perceptible et compréhensible dans cette relecture intriguant d’une des vilaines les plus puissantes des animations Disney. Nous regrettons ainsi la perte des ailes, qui ont emmené un personnage qui avait quelque chose à raconter. Or, il n’y a rien de bien surprenant à raconter dans le second volet par le réalisateur norvégien Joachim Rønning. Décidément, l’écurie des rêves ne lui réussit pas trop, notamment après avoir essayé de réanimer la franchise « Pirates des Caraïbes » en noyant son 5ème volet dans l’oubli et la malédiction. Et il finit par rééditer les mêmes sensations de frustration au terme d’un épisode négligeable, inoffensif et confus dans ce qu’il souhaite entreprendre. Tout cela pour insister sur le fait que ce projet ne repose pas sur de bonnes ambitions afin de convaincre l’audience.
Il était donc deux fois dans les terres enchantées que l’on reconnaît peu. La magie se dissipe aussitôt qu’elle apparaît. De plus, la mise en scène ne fait que rendre ces moments beaucoup artificiels. Le film se restreint à un choc de belles-mères pour une union qui semblait être la seule justification de cette suite, qui ne sait plus où donner de la tête avec ses sous-intrigues. Beaucoup d’éléments du premier volet sont laissés de côté, à juste titre, car le réalisateur prend la responsabilité de « sortir du conte et des légendes ». Plus de belle au bois dormant donc, nous avons à faire à une Aurore (Elle Fanning), seule contre tous, cherchant à tout prix à s’émanciper de l’image de la princesse en détresse. C’est loupé. C’est sur le point émotionnel, dans cette relation mère-fille, que l’on attendait un fort développement, mais la distance entre cette dernière et Maléfique (Angelina Jolie) ne conditionne pas assez le sentiment de tendresse, qui nous arrive comme un cheveu dans la soupe, au moment opportun.
La touche ironiquement chaleureuse se trouve du côté de la véritable vilaine du récit, la reine Ingrith, portée par une Michelle Pfeiffer qui n’est pas présente pour faire de la figuration, à l’instar d’un prince Phillip suffisant ou même d’une Aurore peu investie. Ainsi, elle renoue avec la fermeté et la réalité des choses, d’où son affiliation avec un royaume d’hommes, pour ne pas dire humains. Exit le destin et la fatalité, il faut des actes pour se faire entendre. Ils sont certes militaristes dans son cas, mais cela aurait eu plus d’impact ou d’audace si on pouvait un peu plus la faire sortir de son royaume. Malheureusement, le véritable souci de tout cela, c’est bien la démonstration de la méchanceté, liée à une non-morale, typique des happy-ending de Disney, il y a incompatibilité. Le jeu du pouvoir n’a donc pas de sens ici et le climax qui provoque l’affrontement est niais et trop coloré sous un soleil éclatant. De ce côté-là, le film prend certaines dispositions qui rompent avec la féerie, mais le dénouement est voilé de sourires, sans compter des vies manquantes de part et d’autre de ce naufrage scénaristique.
En somme, « Maléfique : Le Pouvoir du Mal » survole son sujet, brasse de l’air et cultive sur des bases trop classiques pour se démarquer des autres œuvres, comme l’avait fait le premier opus. On aborde cette suite avec de nombreuses facilités et le rythme freine rapidement nos espérances. Le ton, trop gentillet ne prend pas au sérieux son intrigue qui a un malgré tout un potentiel. Nous sommes loin de la friandise promise, loi de la magie et l’originalité. Des personnages sont sacrifiés pour servir une avancée parfois absurde, que ne prendra pas la peine d’expliquer davantage, tout comme ce royaume faussement ténébreux de Maléfique et son peuple. Être suffisant à un prix et c’est payé par une crédibilité qui ne donne même pas envie d’y croire. Nous sommes là, assis, en attendant que la dernière plume tombe et nous ramène à la raison.