Au vu de ma note, il n’est pas difficile de comprendre que je ne suis pas tombé raide dingue de cette nouvelle comédie de Dany Boon. Mais où est cette légèreté fantasque qui avait fait le succès de "Bienvenue chez les Ch’tis" ? Alors que l’exagération n’était utilisée qu’à dose homéopathique (du moins juste ce qu’il faut pour appuyer quelques clichés), ici elle ressort beaucoup plus, à tel point qu’elle semble permanente. Oui ben ça ne va pas vous friser les cheveux pour autant. La désillusion commence d’entrée avec l’interprétation clownesque d’Alice Pol. Qu’est-ce qu’elle est grimacière ! Alors qu’il ressort au naturel de la comédienne une charmante candeur, son personnage est plus hyperactif, en proie à une effervescence de tous les instants. Elle est même carrément survoltée ! Alice Pol a certes des capacités dans le domaine du rire, tant et si bien que Dany Boon lui-même la qualifie de Pierre Richard au féminin (propos recueilli lors d’une interview), mais trop c’est trop. Il aurait mieux valu s’en tenir à cette candeur doublée d’une douce et subtile maladresse. Parce que là, tout parait gros. Très gros. Trop gros. Et comme elle n’a de cesse d’en faire des tonnes et des tonnes, ça devient assez rapidement caricatural et limite agaçant. Nous pouvons comprendre que Dany Boon ait voulu rendre hommage aux unités d’élite de la police, bien que son idée date de bien avant les événements qui ont mis ces unités sur le devant de la scène internationale. Il fallait en choisir une, et c’est avec une certaine logique répondant au jeu de mot qu’il se penche sur le RAID (devenu rétroactivement l’acronyme de "Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion"), laissant ainsi de côté le GIPN, le GIGN, et la BRI pour ne citer qu’eux. Dany Boon témoigne d’une vraie admiration envers les corps d’élite, et ça se voit lorsque les agents reviennent d’une intervention sous les applaudissements des collègues restés au QG. Il n’est pas le seul. Les spectateurs vouent une immense admiration à ces courageux policiers anonymes, et ce depuis la traque qui a suivi les différentes attaques qui ont secoué le tout Paris et la France entière en janvier 2015. Parce que… il fallait y aller quand même ! Surtout quand on sait que les terroristes étaient lourdement équipés, des armes de guerre aux explosifs ! Seulement à vouloir en faire absolument une franche comédie, Dany Boon décrédibilise toute la rigueur, toute la formidable exigence que demandent ces unités d’élite, en l’occurrence le RAID. Oh je ne dis pas que les véritables agents ne partagent pas de bons moments, il doit même y exister quelques croustillantes anecdotes. Mais de là à en faire une farce, il y a plus d’un pas. Pire : n’importe qui peut l’intégrer ! Non pas parce que l’agent Johanna Pasquali est une femme, puisque les deux premières femmes ont réussi à intégrer pour la première fois le RAID (c’était en 2014) jusqu’alors exclusivement masculin, d’où sans doute cette misogynie prêtée à l’agent Eugène Froissard pour l’occasion mis en charge de la formation des stagiaires en vue d’en faire de nouvelles recrues. Non, c’est la façon dont ça se passe dans le film, bien que ça dénonce aussi le peu de considération envers l’argent du contribuable. Franchement, c’est d’un ridicule… Nous savons tous heureusement que l’intégration au RAID est on ne peut plus sérieuse et exigeante alors question vraisemblance, on repassera. Même les scènes d’entraînement (très édulcorées) tournent au rocambolesque. Pourtant Dany Boon s’est donné les moyens, fort d’un budget conséquent de 32,4 millions d’euros, malgré tout jugé insuffisant. Insuffisant parce qu’il a fallu reconstituer les décors intérieurs du château de Vaux-le-Vicomte, les propriétaires de ce dernier prenant trop cher pour tourner à l’intérieur. Sinon, les scènes à l’extérieur de ce magnifique bâtiment se sont déroulées sur place, de la même façon que les scènes à l’Elysée ont été tournées à l’Elysée, que les scènes relatives au Ministère de l’Intérieur ont été réalisées au Ministère de l’Intérieur, et que les plans aient été directement pris au QG du RAID. Reste tout de même la réplique exacte de la salle d'entraînement. Pour en revenir à la crédibilité, le bât blesse quant à l’anonymat des agents. Je veux en venir au fait qu’ils soient masqués par le biais de cagoules dès lors qu’ils sortent de leur base en vue d’une opération. Alors qu’ils se déplacent en véhicule pour aller sur une intervention ou en revenir, ne sont-ils pas censés garder leur accessoire en place ? Cela mérite réflexion, mais cela a le mérite d’augmenter la lisibilité sur l’identification des personnages à ces moments-là. Chacun appréciera ce petit travers… ou pas. Tout n’est pas mauvais pour autant : on aimera comment le commandant du RAID Patrick Legrand mouche le cynique Ministre de l’Intérieur (Michel Blanc), et ce avec le plus grand sérieux et un aplomb incroyable ! Formidable François Levantal ! Au final, c’est lui le plus sérieusement "amusant". Cependant la vraie bonne surprise vient d’Yvan Attal, heureux comme tout dans ce rôle de drôle de méchant (ou méchant drôle) où il a pu de son propre aveu vraiment jouer. Il en ressort une scène particulièrement savoureuse où il demande à son acolyte s’il ne veut pas faire la femme… On comprend que cette scène a dû être particulièrement éprouvante pour ne pas céder au fou-rire. Le spectateur en aura un aperçu dans le bêtisier, lequel n’est hélas pas intégré dans le générique de fin mais dans les bonus du DVD. Il en résulte une comédie qui ne fera pas date dans la filmographie de Dany Boon, car elle laisse trop un goût de grand-guignolesque, sans parler du fait que des erreurs grammaticales se sont glissées dans les dialogues (j’en ai détecté deux). Ce n’est pas très sérieux, tout ça…