Regarder Personal shopper entraîne une telle addiction qu'il est presque impossible de se décrocher de l'écran. La même sensation qu'on a quand on ne peut pas éviter de regarder les accidents en route: l'attirance par le désastre, l'adrénaline de l'horreur, la fascination malsaine par tout sinistre: en définitive, la réalisation d'Olivier Assayas.
L'intrigue et le début sont merveilleux. L'assistante personnelle d'une star de la mode est capable de contacter avec les fantômes attrapés entre les deux mondes. Stewart vient à point pour le récit grâce à son aura cool et à son iconique apathie. En plus, elle est capable d'équilibrer une façon très douée sa langueur habituelle avec l’inquiétude dans les scènes les plus inquiétantes. Dans la première scène on la voit parcourir dans le noir les chambres vides d'une mansion cherchant des signales dès l'au-delà. L'épisode se déroule avec une tranquillité nous rappelant légèrement au chef d'oeuvre de Guerín Le spectre du Thuit ou le posthume Visite, mémoires ou confessions de Oliveira. Malgré tout, le film se dégonfle trop vite.
D'un coup on se trouve faisant face à trois histoires, dont aucune d'elles arrivera à nous apporter une intrigue solide. La trame des fantômes réveille notre curiosité grâce à une charge dramatique au détriment des modestes effets spéciaux, dans le style de La fille de nulle part de Brisseau. Malheureusement sa conclusion est si ridicule qu'inutile. Ensuite, le poids du thriller est limité à deux scènes d'action plus des interminables conversations sur Whatsapp où Assayas essaye de lier le monde spectral avec le monde sur terre, mais échouant irrémédiablement. La protagoniste flirte avec le danger et le risque sans provoquer aucune réaction chez le spectateur.
Dernièrement, la vie professionnelle de la protagoniste. S'en servir d'une assistante personnelle pour critiquer le monde de la mode devient trop facile. Si vraiment on voulait être incisif on devrais au moins faire l'effort. Une patronne despotique et avare, puis un voyage express à Londres ne suffisent pas pour tenir la soit-disant intrigue principal, celle qui donne titre au film. En plus, Assayas ose mettre en question le manque de liberté des photographes de mode face aux marques quand lui-même, dans un exercice de schizophrénie - ou un appel au secours subliminal, on sait jamais - fait de la pub à Chanel et Cartier tout au long du film. Plus que cela, l’épilogue se déroule en Oman, dont le sultanat coproduit le film, se remarquant de loin l’imposition des mécènes.
Personal shopper fera probablement partie des classiques du cinéma si mauvais qu'ils deviennent cultes. Le principal responsable son réalisateur, qui s'en sert trop de ses astuces habituelles. Le méta-cinéma fait apparition avec un morceaux où le chanteur à la mode joue Victor Hugo. D'ailleurs, un épisode beaucoup plus intéressant que le film lui-même et qui ressemble au style d'Albert Serra. On retrouve aussi les fondus à noire à l'Assayas qui empêchent les différentes, et déjà décomposées, intrigues de converger. Ne parlons pas du refus de tout code du cinéma d'horreur ou du thriller pour éloigner Personal shopper des cercles commerciales, nous laissant pourtant face au vide, à la banalité.
L'horreur. Amusant, mais l'horreur quand-même.
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