Bon… C’est sympa de voir que les studios Aardmann se risquent à nouveau à s’éloigner de leur pépite « Wallace & Gromit », mais d’un autre côté, je trouve qu’une fois de plus, à l’image de « Souris City » ou autres « bandes de pirates », l’essai n’est pas vraiment concluant. C’est triste à dire, mais le gros problème de ce « Cro Man » c’est qu’il manque incroyablement de consistance et de cohérence. OK, il y a une certaine forme d’inventivité (
parce que bon : mélanger hommes préhistoriques, canards géants et football, il fallait quand même avoir l’idée !
), mais d’un autre côté tout ça est tellement mal ficelé que je trouve que ça ne marche jamais vraiment. Il y a tout d’abord un vrai problème de narration pour commencer. Personnellement, je suis venu voir ce film sans rien en savoir, et il m’a fallu la blinde de temps pour comprendre de quoi il allait vraiment retourner.
Au départ on nous montre des hommes préhistoriques et des dinosaures interrompus dans leurs quotidiens par l’arrivée d’une météorite. Les hommes survivent sans souci, pas les dinosaures. Bon OK, c’est pas très logique tout ça, mais on s’en fout, why not… D’abord surpris, les hommes se mettent à jouer au football avec le caillou interstellaire, puis on enchaine rapidement vers autre chose : le cratère est devenu le centre d’un écosystème particulier qui y abrite des tribus de chasseurs et c’est dans ce contexte qu’apparaissent nos deux héros : Dug et Crochon… Moi, perso, à ce moment là de l’intrigue, j’avais assimilé le foot à un simple gag, dans la même tonalité que les dinosaures qui se tapent dessus ou bien du cafard qui met ses lunettes de soleil. Pour moi, cette intro, vu qu’elle enchaine derrière sur le fait que le cratère soit devenu un lieu de vie extraordinaire, elle n’était là que pour expliquer la nature de ce monde fragmenté en deux entités, et surtout pour focaliser sur l’importance de la météorite qu’on a l’air de nous présenter comme un élément déterminant de l’intrigue. En tout cas, tel que c’était présenté, moi j’avais déjà benné le foot depuis longtemps de l’intrigue ! C’était présenté comme un gag gadget qui enrobait le véritable enjeu de l’intrigue, un peu à l’image des dinosaures qui se battent et de la blatte à lunettes ! Et comme en plus le film insiste bien sur les scènes de chasse qui suivent – qu’on nous parle de mammouths, des limites du monde, de l’importance de respecter la nature, pour moi c’était évident que le cœur du sujet ça allait être ça ! Quel intérêt à poser autant d’éléments d’amorçage d’intrigue si ce n’est pas pour les utiliser par la suite ?! …Eh bah la blague, justement elle est là ! Météorite, nature, cratère : au fond, tout ça est benné et on y reviendra jamais ! Epic joke !
Personnellement, je trouve ça dingue que le scénario s’attarde autant sur un paquet d’éléments d’intrigue insignifiants, ne sachant pas faire de hiérarchie là-dedans, au point d’être à ce point illisible dans ses intentions. D’ailleurs, quand au bout de dix minutes je vois débarquer les mammouths sur lesquels les personnages principaux se sont bien attardés durant toute la phase d’installation de l’intrigue, je me dis que c’était bon, qu’enfin le film était lancé ! Eh bah que dalle ! Non seulement ces mammouths on n’en reparlera plus jamais, mais en plus on les remplace rapidement pas les personnages d’opposants les plus basiques du monde, ce qui est quand même une sacrée douche froide ! Et le pire, c’est qu’il faut encore dix minutes pour se rendre compte qu’en fait la phase d’installation n’est toujours pas finie ! Bah non ! Il fallait encore présenter le monde du bronze ; le fait qu’ils soient fans de foot ; et le fait que la survie de la communauté de Dug va en fait se jouer sur un match ! Cette installation elle est longue, plate, pas logique… et puis surtout elle débouche sur quelque-chose de tellement pas intéressant ! Au bout de cinq minutes, on a l’impression que le film va te parler du rapport d’une communauté à son écosystème, voire de l’interprétation absurde qu’elle a de son environnement et de son histoire (je fais notamment ici référence à ce qu’ils disent des peintures). Or ça – oui – pour le coup ça aurait pu être intéressant. Au bout de dix minutes, quand je vois débarquer les mammouths mécaniques, je me dis que le film va plutôt jouer d’une opposition entre société primitive et société moderne, ce qui là-aussi aurait pu être intéressant. Voir même, au bout d’un quart d’heure, quand on découvre la cité de bronze, j’en suis même venu à me demander si le film n’allait pas aller jusqu’à se risquer à une lecture accélérée, fantaisiste et loufoque de l’histoire de l’humanité. Après tout, vu comment les choses se juxtaposaient et prenaient du temps, ça avait du sens de le croire ! Surtout quand – encore une fois ! – le film passe un temps fou à insister sur des détails insignifiants comme Dug qui s’attarde sur tous les nouveaux outils découverts ! Bref, de tout ce que le film aurait pu être, je trouve ça absolument dingue qu’il ait opté pour une intrigue simpliste et tirée par les cheveux qui, en fin de compte, ne dit strictement rien. Alors OK, on pourrait m’opposer l’argument qu’un film n’est pas forcément obligé de dire quelque-chose ; d’avoir un propos ; surtout un film d’animation qui semble surtout destiné à un public jeune… Certes, d’un côté j’aurais envie de dire oui. Mais bon, d’un autre côté, après avoir vu ce « Cro Man », en toute honnêteté, je commence à être convaincu qu’en fait NON : d’une manière ou d’une autre, il faut quand même qu’un film dise quelque-chose pour être intéressant un temps soit peu. Il faut qu’il dise quelque-chose soit par la forme, soit par le fond, soit par les deux. Parce qu’après tout, c’est quoi un film qui ne dit rien ? C’est juste des scènes qui s’enchainent sans véritable sens. C’est juste des gags et des belles images qu’on enchaine sans véritable logique parce qu’on trouve ça drôle ou joli. Alors oui, pourquoi pas. Mais dans ce cas il n’y a quand même aucun parcours de spectateur là-dedans ! Aucune implication ! Aucune expérience ! Et c’est au final justement ce que j’ai ressenti face à ce « Cro Man ». Ce film ne dit rien. Son histoire je l’ai traversé sans émotion. Ses personnages sont tous des stéréotypes vus mille fois. Le héros lambda. L’animal de compagnie amusant. La fille qui cherche à prouver ce qu’elle vaut. Le méchant ridicule. La troupe de personnages insignifiants sensés animer la galerie… Mais c’est d’un triste ! Pourquoi cette association : football ET préhistoire ET lutte pour un terrain ? Cette combinaison, elle est juste aléatoire ! On n’en fait rien ! On n’en fait même pas un film loufoque parce que les structures narratives sont beaucoup trop plates et standardisées pour ça ! …Alors pourtant, je mets quand même 2/5. Après un tel déluge de reproches, ça paraitrait presque beaucoup. Bah oui, mais d’un autre côté, j’ai du mal à le vomir non plus ce film. Il essaye d’être sympa. Il essaye de construire un environnement riche. Il s’efforce de reposer sur un humour simple et pas prétentieux. C’est terrible à dire, mais je trouve que malgré toutes ses limites, on ressent que le film a été fait avec honnêteté et bienveillance. Au fond, ce « Cro Man » n’est pas une arnaque. C’est juste un film plat et mal fichu. Et pour être honnête, c’est presque ça le plus triste… Bon alors après, ce n’est que mon point de vue. Donc si vous n’êtes pas d’accord et que vous voulez qu’on en discute, n’hésitez pas et venez me retrouver sur lhommegrenouille.over-blog.com. Parce que le débat, moi j’aime ça… ;-)