Eh bien voilà : les folles aventures du jeune agent secret le plus improbable (du fait de sa condition au moment où il a été recruté) qui ait jamais existé sont reparties pour un tour. Ce dont le spectateur devait se douter, quand même… Ben oui, on n’assiste pas à l’avènement d’un jeunot sorti vainqueur de la difficile formation donnée par l’élite des services de renseignements britanniques. Ça, c’est la première chose. La seconde, et pas la moindre, c’est que cet enrôlement, qui a fait l’objet du premier film de cette nouvelle franchise, a rencontré un grand succès auprès du public. Un succès inattendu, du moins dans ces proportions-là. Quoiqu’il en soit, malgré le décès du mentor magnifique Galahad (Colin Firth), il y avait largement la place de continuer sur la lancée. Et c’est ce que les scénaristes ont fait, en rebondissant sur un des recalés au recrutement Kingsman, amenant une première scène d’action aux cascades innovantes et époustouflantes. Dès cette première scène, cette patte toute britannique est tout de suite reconnaissable dans ce mélange si singulier de "Chapeau melon et bottes de cuir" avec la saga "James Bond", avec toutefois un ingrédient de plus : une petite touche de poursuites à la "Tokyo drift". Alors bien sûr, les références cinématographiques peuvent être vues au premier coup d’œil, mais l’ensemble tient la route. D’autant plus quand c’est stylisé à souhait par les ralentis qui améliorent grandement la lisibilité de la scène. Mais ce recalé Kingsman n’est que l’arbre qui cache la forêt. Ou la partie apparente de l’iceberg. Mieux : les fumerolles d’un thé en préparation. C’est-à-dire le commencement d’un problème beaucoup plus grand. Alors nos valeureux agents devaient obtenir des moyens plus grands. Et hop ! On américanise le tout en partant aux Etats-Unis. Le choix était pourtant osé : soit les scénaristes risquaient d’offrir un spectacle aux airs de déjà-vu en restant sur les terres d’origine, soit ils prenaient le parti du danger résidant dans une perte possible de l’identité propre et si particulière qui avait surpris tout le monde lors du premier opus. Mais cela a le mérite d’avoir offert l’opportunité d’amener des personnages différents, sans que ça ne soit choquant, bien au contraire. Force est de constater que Matthew Vaughn et Jane Goldman (les scénaristes) ont réussi un véritable tour de force en dosant chacun de ces éléments contextuels et personnifiés avec brio. Le tout est cohérent, parce que bien construit. Bien sûr, on passera sur la crédibilité de l’histoire, bien que le récit se tienne. Je veux dire par là que le spectacle est résolument tourné vers le divertissement pur et dur. Et ça marche ! Grâce à des scènes d’action innovantes et impressionnantes (la scène d’ouverture, le téléphérique), à l’humour tantôt fin tantôt un peu facile et au rythme soutenu, les 141 minutes passent sans coup férir. Les contrastes sont pourtant nombreux. Colin Firth montre toute l’étendue de son talent (dont personne ne doute) en ce seul film avec ce que je vais appeler du « avant/après » dans un rôle en totale opposition avec ceux dont ont hérité le sublime Pedro Pascal en fougueux agent Whisky, Channing Tatum dans la peau de l'arrogant agent Tequila , ou encore Bruce Green dans ce pastiche du Président américain. Et pourtant, ils sont tous
(enfin normalement…)
du même côté de la barrière face à une menace dont le danger n’a d’égal que la grandeur du cliché alloué au méchant servi avec un plaisir non feint de la part de Julianne Moore, savoureusement machiavélique
(le hachoir, les chiens…)
et bien secondée par Edward Holcroft très convaincant dans le rôle de Charlie. Cependant j'ai un petit doute sur son doublage en français, tant il me parait un tantinet trop appuyé dans le cliché. Oui le casting est impressionnant, surtout si on tient compte des courtes apparitions de Jeff Bridges, d’Emily Watson (Fox) toujours aussi touchante, et enfin de Halle Berry dans un rôle similaire à celui de Merlin (Mark Strong). Un casting de rêve qui de prime abord fait frémir avant même que le spectacle commence, mais pas dans le bon sens du terme pour la bonne et simple raison que nombreux sont les longs métrages qui ne reposent que et uniquement sur le prestige de la distribution, aboutissant la plupart du temps à un résultat des plus décevants pour ne pas dire médiocre. Le grand bémol revient à la présence d’Elton John. Oui, je parle bien de Sir Elton John, celui-là même qui a composé et chanté le sublime "Candle in the wind" lors des funérailles de Lady Di, la Princesse des cœurs. Pendant longtemps, on se demande ce qu’il fout là, et on pense être en présence d’une lubie complètement délirante de la part des scénaristes. Le fait est que son rôle, aussi déjanté soit-il, a son importance. Cependant, même si son aptitude à l’autodérision doit lui être reconnue, j’y aurai plutôt vu quelqu’un de plus lambda, un anonyme tout ce qu’il y a de plus banal, un type délicieusement crétinoïde sur les bords comme Sir Elton l’est ici dans son propre rôle
(mais pas tant que ça en fait)
. Il ne reste plus qu’à citer la bonne partition de la paire Henry Jackman/Matthew Margeson qui finit de bien lier tout ça. Donc oui, "Kingsman : le cercle d’or" est un bon divertissement qu’il serait dommage de rater. Et pour ceux qui connaissent le film qui a lancé le produit Kingsman dans le 7ème art, nul besoin de le revisionner. Matthew Vaughn a pris la peine de faire quelques petits rappels ici et là, ce qui réduit à rien les deux ans et demi qui séparent les deux films. Et si vous espérez éventuellement une scène post-générique, eh bien votre attente sera vaine.