Xavier Dolan penche toujours sur son expérience personnelle pour raconter des histoires, même si elles sont des adaptations. De ce qu'il pense des relations familiales, en particulier entre la mère et le fils. Alors qu'il avait ému et touché la majorité du public avec Mommy, le réalisateur québécois revient avec un film beaucoup plus fermé. Volontairement bien sûr car Juste la fin du monde se déroule dans un tout petit périmètre et ne concerne qu'une famille, à moitié ravie de revoir Louis, qu'il n'avait plus revu depuis 12 ans. Le film est magnifique. Magnifique dans le sens où Dolan utilise sa touche artistique pour donner un ton particulier, virant du malaise aux souvenirs offrant une liberté d'esprit. Utilisant pratiquement que des plans très serrés sur les acteurs pour les confiner encore plus dans leurs retranchements et dans leurs émotions de visages, dans le regard, dans les expressions, Dolan frappe fort car il donne cet aspect presque suffoquant pour le spectateur, tout en attirant un maximum d'empathie pour Louis, dont nous sommes les seuls au courant de ce pourquoi il revient voir sa famille. On a envie que tout pète, on a envie que toutes les plus grosses vérités soient crachées à la gueule de chacun pour pouvoir respirer, mais le film offre un malaise volontaire qui fonctionne bien. Alors si je trouve sa mise en scène plutôt réussie, pourquoi je ne le qualifie pas non plus de chef d'oeuvre ? Car il ne m'a pas entièrement emporté, à cause en partie justement de ces choix de plans parfois trop redondants, trop longs, qui donneraient presque une sensation de m'as-tu-vu. Etant une pièce de théâtre à la base, les monologues se comprennent dans leur longévité. Et très souvent ça marche, grâce aux interprétations des acteurs. Natalie Baye est très émouvante et protectrice, Léa Seydoux plutôt surprenante en petite rebelle râleuse, et Vincent Cassel, qui domine largement les autres, offre une interprétation incroyablement juste et sincère dans ce personnage antipathique qui finalement est celui qui nous touche le plus. Petit bémol en revanche pour les parties de Marion Cotillard, que je trouve vraiment trop insupportable à certains moments. On comprend ce qu'essaie de nous dire Dolan dans le jeu de l'actrice, mais c'est parfois trop long et beaucoup trop lourd. Gaspard Uliel quant à lui offre quelque chose de très sincère et touchant. Il a besoin de peu de mots pour nous faire comprendre ce qu'il ressent à travers les disputes de sa famille. Une belle brochette d'acteurs donc qui est un atout majeur pour le film qui dure suffisamment longtemps pour offrir une fin qui prend aux tripes de par sa mise en scène, son montage, son ambiance. Le choix des musiques a souvent tendance à faire penser à Mommy, sachant que des musiques populaires comme Dragostea Din Tei sonnent comme une sensation de fraîcheur de liberté, dans les souvenirs de Louis, qui offrent aussi d'ailleurs de jolies lumières et de belles sensations. Donc voilà, Juste la fin du monde est un film vraiment bien géré par Dolan, mais qui pour moi souffre de quelques maladresses et ne m'a donc réellement frappé à la gorge que dans les 25-30 dernières minutes, malgré l'empathie permanente que nous avons pour Louis. Un beau film que nous offre le jeunot québécois.