CRITIQUE : 7 ans de carrière, 6 films, 2 prix à Cannes et l'international désormais. Xavier Dolan, québécois, pas encore la trentaine a grandit et s'est épanoui au rythme de ses films et celui-ci, va faire couler beaucoup d'encre. On va l'aimer, le détester, enfin surtout parler de lui et ça, c'est tout sauf "la fin du monde"!
Dans son premier film au grand casting, son sens de la mise en scène reste intacte et c'est ce qui fait la singularité de Dolan. Son style est unique mais comme tout grand artiste, difficile à appréhender. Son maniérisme, son exubérance et son lyrisme, propres à sa personne trouvent chaque fois une place dans son cinéma, mais s'installent avec le temps, avec plus de mesure, de maturité sûrement. Dès lors, on comprend que son cinéma va se faire connaître, chaque fois davantage, mais qu'il ne troquera jamais son sens de la caméra.
Son parti pris à vouloir filmer les acteurs au plus près, les faire prisonniers de la pellicule rend d'emblée le film anxiogène. Ici on parle de grands sentiments, de cris du coeur et leurs expositions sont chirurgicales. Film donc oppressant ou tout simplement intense. Chacun des 5 grands acteurs livrent une grande prestation, comme s'ils livreraient une grande bataille. Et avec nous sur le champ de bataille. On vit l'expérience "dramatique" essorée de larmes, comme si on avait gelé sur place. Pas le temps pour l'empathie, ni pour le regret, c'est le mystère de chaque personnage que l'on tente de décrypter. La tâche est complexe et Dolan nous lâche des brides, par instants de fulgurances. Le reste, on le construit, par notre esprit.
La musique toujours, celle d'un enfant des années 90 habille toujours aussi bien ses films. Ici elle trouve son sens encore, par envolées poétiques, dans le passé du personnage central en l'occurrence.
Avec tout ça mais aussi sa fin anthologique, tragique et métaphysique, Xavier parvient à nouveau à captiver et semble s'installer pour la postérité, une bonne fois pour toutes. Ce n'est pas le chef d'oeuvre "Mommy" sûrement, mais c'est du très grand cinéma, bien sûr...