Pour son nouveau film, Ayouch a décidé de traiter d'un sujet ô combien sensible. Tellement sensible, que son film a été interdit dans son propre pays, le Maroc. Et pourtant, à la sortie de la projection, on se dit que l'ensemble du peuple marocain devrait pouvoir voir ce film car cela permettrait, sans doute, d'ouvrir les esprits. Pour raconter le quotidien de quatre prostitués marocaines (Noha, Randa, Soukaina et Hlima), Ayouch a choisi un réalisme qui vous imprègne encore plusieurs heures après la sortie de la salle. Il montre tout, des scènes de sexe tarifés crues aux moments de tendresse et d'amitié. Il dénonce tout, le quotidien insupportable, la violence, le sentiment de ne pas exister, les rêves impossibles, le rejet de toute une société y compris de leur propre famille, les agressions sexuelles et le raquette de la police, les riches clients saoudiens ou européens, jusqu'à la place étouffante de la religion. Le mérite de "Much Loved" c'est non seulement de révéler quatre actrices talentueuses, mais surtout c'est de donner la parole à ces femmes que l'on n'entend jamais, de jouer de l'humour pour casser la lourde réalité de leur vie, de leur offrir de la dignité et de poser, sur elle, un regard respectueux. Un film cru et politique, un long-métrage plus que nécessaire et salutaire ! Victor Hugo disait que l'esclavage n'avait pas disparu, mais qu'il ne pesait plus que sur la femme, et qu'il s'appelait prostitution. "Much Loved" ne fait que confirmer l'actualité et la véracité de ce constat !