Au début de l'écriture du scénario, César Acevedo traversait des moments éprouvants dans sa vie, tous reliés à sa famille : sa mère venait de mourir et son père "n’était qu’un fantôme", selon ses propres termes. Soucieux de faire ressurgir des souvenirs d'enfance évanescents, le réalisateur imagina un lieu intimiste (une petite maison et un arbre) comme cadre à une réflexion sur sa propre fratrie. Le projet fut un échec mais le cinéaste continua à travailler ses personnages, finalement tous partie intégrantes d'une famille dysfonctionnelle.
Les lieux du tournage, centralisés dans la région du Cauca en Colombie, sont aussi ceux de l'enfance de César Acevedo. Cela n'empêcha pas le cinéaste de procéder à des recherches minutieuses afin de témoigner avec exactitude de l'anéantissement de son peuple, dépendants majoritairement de l'industrie sucrière. Des années d'écriture lui furent nécessaires, aussi parce qu'il lui fut difficile de prendre du recul avec ses propres souvenirs d'enfance.
La mise en scène a été pensée par César Acevedo comme un approfondissement des relations entre les personnages : "il m’est apparu essentiel d’exprimer à l’écran la distance entre les corps et les émotions des personnages". Pour cela, le cinéaste a travaillé la longueur des plans, établie par la présence de plans-séquences, afin que le spectateur ressente l'enfermement des personnages. A cet aspect visuel se rajoute un travail du rythme, scindé en deux : d'abord lent et oppressant (pour signifier un malaise), il devient plus fluide au fur et à mesure que les personnages se rapprochent les uns des autres.
Si la portée intimiste du film permet au cinéaste d'évoquer des figures familiales disparues, le décor le pousse aussi à donner une portée politique à son projet. La dimension écrasante des cannes à sucre autour de cette petite maison en pleine nature évoque ainsi le poids du progrès ou, comme le dit César Acevedo, "l'illusion du progrès". Il nuance cependant : "ma priorité a toujours été de montrer le sentiment d’appartenance des paysans à une terre, et l’importance de leur résistance."
En dehors des actrices principales, les comédiens n'avaient jamais joué la comédie de leur vie avant le début du tournage. Etant donné la charge du sujet, la production prépara le casting au sein d'un programme intensif de six semaines, au cours duquel chacun travailla l'éveil de sa mémoire et apprit à se connecter avec ses émotions. Sur le plateau, les apprentis comédiens découvrirent la situation de la scène à tourner le jour même, accompagnée de quelques dialogues. Beaucoup de prises furent nécessaires mais permirent, selon le cinéaste, de resserrer les liens au sein de l'équipe.
Le film fut présenté à la Semaine de la critique au Festival de Cannes 2015, sélection de laquelle il ressortit avec le prix suprême, la Caméra d'Or. Sabine Azéma, présidente du jury, commenta ainsi le choix de son équipe : ‘‘ Nous avons vu 26 premiers films et nous avons trouvé notre trèfle à quatre feuilles dans un champ de cannes à sucre ’’.