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Bruno François-Boucher
108 abonnés
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5,0
Publiée le 3 mai 2016
Un film sur l’horreur des camps nazis annihilant toute fiction, une forme de cinéma vérité, la caméra suivant au plus près le visage d’un acteur en minimisant les arrières plans, légèrement floutés, suggérant plutôt que montrant. Une proposition de cinéma inédite, relatant en 1944 le quotidien d’un Sonderkommando (unité de travail composée de prisonniers juifs forcé de procéder au processus d’extermination de la solution finale) au coeur de l’inimaginable barbarie d’Auschwitz. Hongrois réduit à l’état d’esclave, manœuvre déshumanisé de la machine de mort nazie l’ayant dépouillé de toute personnalité, Saul (Geza Rohring) est chargé de trier les vêtements des corps assassinés, de transporter les cadavres, d’en disperser les cendres et de nettoyer les chambres à gaz après les exécutions. Tout ce que l’on comprend des abominations est suffisamment explicite pour que les cinéastes n’aient à les traduire en images au travers d’un voyeurisme indigne de l’Histoire et de la mémoire ; l’on comprend également le déroulement des opérations criminelles qui dépassent leur entendement de par la quasi seule présence du visage de Saul, témoin impuissant et épouvanté qui subit lui aussi les coups des bourreaux, une petite parcelle de sa conscience demeurant en éveil pour tenter d’échapper physiquement et psychologiquement à l’extermination. Il faut comprendre que l’abattoir humain de la Shoah fut l’unique cas dans l’Histoire d’un génocide programmé, organisé et administré tel un gigantesque réseau industriel dont l’horreur du mécanisme, on le sait maintenant, alla jusqu’au recyclage des peaux et cheveux des victimes qui servirent notamment à fabriquer des abat-jour et des matelas. C’est d’abattage humain devenu banalité quotidienne dont le film parle, à travers la souffrance d’un homme qui croit reconnaître en un enfant massacré son fils et qui tente d’en préserver la dépouille ; mais c’est aussi de tous les déportés et du traumatisme d’un peuple à laquelle l’œuvre fait référence. Laszlo Nemes, dont une partie de la famille a été assassinée à Auschwitz, est parti du manuscrit des Sonderkommando de Birkenau, "Des voix sous la cendre". Si le film est à voir c’est non seulement pour mieux comprendre le déroulement des faits mais aussi parce qu’il en est une sorte de traducteur, pesant ses mots et ses images et évitant tout écueil d’une banalisation de la représentation. L’acteur Geza Rohring atteint ici un sommet d’intériorité rarement vu à l’écran. On peut à peine parler de travail d’acteur mais plutôt d’une tentative de perception, d’une retranscription de témoignage, sans pathos ni approche fictionnelle. Au cœur du charnier, Saul, en explorant les recoins de par son unique regard, nous le donne davantage à voir et à entendre que n’importe quelle image, n’importe quel son, n’importe quelle représentation dénuée de réflexion et de sens. "Le fils de Saul" est un événement parce qu’il propose une vision reformulée de la réalité de la Shoah en la suggérant de l’intérieur.
Visuellement le film est surprenant, puisque je ne me rappelle pas avoir vu quelque chose d'entièrement filmé en plans serrés. Ce postulat particulièrement original plonge le spectateur dans le feu de l'action et il est indéniable que cela renforce le sentiment de malaise. Les scènes qui se succèdent sont évidemment éprouvantes tant l'horreur est palpable (même si on est plus dans la suggestion), mais curieusement l'indifférence éprouvée par le personnage principal, un scénario réduit à sa plus simple expression et qui tourne en rond, privent le spectateur de l'essentiel de l'émotion qu'un tel sujet devrait dégager.
Un film âpre, austère et parfois insoutenable qui montre l'effroyable. Le parti pris de mise en scène (beaucoup d'arrières plans restent flous) accentuent encore plus la violence. Une histoire dont on ne ressort pas indemne, dommage que tous les dialogues ne soient pas tous traduits...
Un film étonnant et passionnant. Un plongeon choc dans l'horreur pur, supportable bien qu'impressionnant quand même par une idée de mise en scène simple mais efficace, filmer le personnage principal à hauteur de visage. Une prise de vue remarquable, un acteur fascinant et une superbe réflexion sur l'horreur, le courage et la dignité. Très fort. Le grand prix à Cannes était un minimum, La Palme d'Or n'aurait pas été volée.
Lazlo Nemes a le talent de la jeunesse et porte en lui l’héritage d’une famille touchée par l’extermination finale. Il ose une façon de filmer différente de tout ce que l’on a pu voir jusqu’ici, spécifique au sujet, et qui conditionne définitivement notre façon de regarder l’inimaginable. On peut être fasciné ou sortir fatigué par ce parti pris. Mais pas indifférent.
Nemes ne filme pas Auschwitz, même si l’action se passe dans le camp. L’intrigue n’est pas non plus centrée sur les Sonderkommando, même si Saul en fait partie. De fait, on y apprend un peu plus sur les travaux forcés et morbides qui leur sont assignés.
Nemes s’intéresse au parcours intérieur d’un homme – « déjà mort parmi les vivants » comme lui dit un de ses compagnons. Son activité frénétique est insensée, au-delà du rationnel, elle est dérisoire, illusoire, qu’en saura-t-on vraiment?
Elle est une tentative de rester debout au bord de la fosse.
Personnellement, je n’ai pas été franchement ému, au point d’hésiter à le recommander. Cependant le travail de cinéaste a une vraie valeur, une réelle intention. Et, pour en discuter, il est nécessaire d’avoir voir reçu en pleine figure le résultat de son travail (la bande de son est essentielle et remarquable). Paradoxal, n’est-il pas?
Un film extraordinaire parce qu'admirablement mis en scène sur un sujet ô combien difficile à traiter parce que sujet à toutes les polémiques... Mais, là, franchement, rien à redire, le réalisateur nous plonge au sein de l'horreur et nous y laisse jusqu'au bout...
Un film terrifiant, un véritable coup de poing qui laisse abasourdi et donne la nausée. Si le fait de mettre en image l'holocauste reste une obscénité pour certains, et on ne les blâmera pas, Laslo Nemes y met une telle sincérité et une telle humilité qu'il faut y voir une prouesse artistique et historique sans précédent. Son dispositif de mise en scène est une réussite absolue qui permet de mettre toute l'horreur de la guerre en hors champ et en son, et de nous y plonger tout droit. Mais on n'est pas là dans un spectacle horrifique gratuit, car le jeune cinéaste met au centre une histoire bouleversante, la recherche d'une lueur d'humanité dans ce qui renie l'essence même de l'homme.Et ce besoin désespéré de se raccrocher a ce qui fait l'homme est un cri dans le marasme, qu'on entend à peine mais qui nous permet de nous dire que tout ça n'aura finalement pu nous détruire en tant que civilisation. Précieux.
Excellent film poignant, perturbant, révoltant, les qualificatifs ne manquent pas. Un film à voir pour se souvenir, évidemment. A lire en même temps le livre de Kertesz, Kaddish pour l'enfant qui ne naitra pas. Un film époustouflant.
Ce film est une illustration du quotidien d'Auschwitz du point de vue d'un membre du sonderkommando. A ce titre il montre absolument tout avec une reconstitution remarquable, et cela de manière subtile pour ne pas tomber dans un grossier voyeurisme. Pour ce faire, la technique est singulière : la quasi totalité du film repose sur un gros plan de son personnage principal, généralement sur une courte profondeur de champ, et tout ce qui se passe autour de lui se laisse en partie deviner, grâce à la bande sonore d'une qualité fantastique, et tout ce qui se trouve au second plan dans l'image. A ce titre, le style plaira ou ne plaira pas. J'ai trouvé qu'il a été bien adapté dans ce film, mais par moment, on a vraiment envie de voir au delà de ce que montre la caméra. Mais cette envie existe parce que ce qui nous est montré est déjà terriblement fascinant. En tout cas, il vaut largement le détour. C'est une expérience particulière.
C'est un film sombre, terrible même mettant en scène la vie d'un juif hongrois, Sonderkomando dans les chambres à gaz et les fours crématoires d'Auschwitz, qui découvre un jour un enfant pas tout à fait mort dans la chambre à gaz. Cet enfant qui ne survivra pas, est le sien. Son seul objectif alors sera de lui donner une sépulture déscente avec un rite rligieux convenable/ Cette histoire au premier plan, souligne au second plan l'immonde mise en oeuvre de l'extermination des juifs par les nazis...Second plan omniprésent mais vu depuis l'arrière du personnage principal et presque toujours en flou, façon habile de faire ressortir l'horreur sans la montrer vraiment, façon peut être aussi de souligner que le sonderkommando omnubilé par son objectif ne voit plus vraiment l'univers qui l'entoure. La deuxièpme trouvaille géniale de ce film est, en contrepoint à ces images floues, un environnement sonore extrèmenet présent, varié, très travaillé, très fouillé, détaillé,et c'est sans doute le premier film où le son est sans doute plus présent que l'image, ce qui confère à l'ensemble uen esthétique particulière. En ragardant ce film j'ai repensé à "la vie est belle de Benigni qui avait lui utilis él'humour et la dérision pour traiter d'un sujet voisin.
Ce film est selon moi raté. Le parti-pris immersif d’être continuellement dans une sorte de plan séquence fait uniquement de plans rapprochés autour du personnage principal empêche finalement tout attachement émotionnel avec ce personnage, malgré toutes les horreurs montrées et empêche aussi toute possibilité de réflexion.
J’ai déjà vu pas mal de film traitant de l’holocauste et des camps de concentration, je ne pensais pas qu’un film sur le sujet réussirai à me secouer à nouveau sur ce sujet. En filmant son personnage principal au plus près le réalisateur crée une proximité avec lui qui rend le drame qui se noue plus près de nous alors que le temps passant à tendance à éloigner le souvenir. On est pris à la gorge dès le début peut être même trop d’ailleurs car une de ses scènes les plus marquantes se trouve à l’introduction du film et donne derrière une légère impression de stagnation voir de baisse d intensité, mais malgré cela c’est un grand film.
D'entrée de jeu, on entre dans le vif du sujet avec une scène d'ouverture de grande puissance. Un scénario entraînant, une réalisation bourrée de plans séquences fascinants, un acteur impressionnant, "Le fils de Saul" est un véritable moment d'immersion. Un très grand film, qui de toute évidence, marquera son spectateur.
la grande force de ce film est d'avoir filmé en cadre serré le personnage de Saul, souvent de dos, avec une faible profondeur de champ afin de plonger le spectateur en immersion totale dans l'horreur de sa fonction au sein du camp d’extermination de Birkenau ( "la petite forêt de bouleaux" en français ). et de transmettre ainsi toute la détresse de cet homme dont la seule obsession est devenue celle de pouvoir offrir une sépulture décente à son fils. Pour avoir fait un pèlerinage dans ce camp l'année dernière, le réalisme ici est d'une force quasi insoutenable, même si le réalisateur évite tout pathos en s'attachant à l'urgence de ce père décidé à tout faire pour ce fils destiné à l'autopsie. Tant de films sur le sujet ont été réalisés mais " le fils de Saul" apporte un regard nouveau tant sur la forme que sur le fond et est sur ce point remarquable d'intelligence et de pudeur.