Les 24h du Mari... Michael Mann, tristement absent de nos écrans depuis longtemps, revient en pétaradant gentiment, sans grand coup de tonnerre, avec ce Ferrari honnête mais assez curieux. Curieux, on s'explique, par le choix de s'intéresser uniquement à la psychologie d'Enzo Ferrari, en délaissant le sujet de l'automobile (même si cela permet d'éviter une redite avec l'excellent Le Mans 66, il est difficile de s'intéresser à un personnage dont le principal arc narratif est sa double-liaison conjugale, quand on voit passer rapidement quelques magnifiques modèles de voitures dont l'intrigue se fiche de nous expliquer les améliorations, le fuselage qui a complètement changé, les contrats avec les autres marques qui changent la gamme Ferrari... Difficile, donc, de regarder le triangle amoureux gueulard que Michael Mann nous pointe du doigt, alors qu'on aimerait plutôt reluquer la carrosserie rouge en arrière-plan). Mais curieux aussi par les choix du casting : on adore Adam Driver au possible, et on ne s'offusque pas du néant absolu de ressemblance avec le modèle original, mais on sent qu'il s'ennuie pas mal dans ce rôle un peu pépère. A l'inverse, Penelope Cruz en fait des caisses (on l'adore aussi, mais : au secours). En revanche, le film est bien rythmé, on a un portrait psycho plutôt complet d'Enzo Ferrari (entre sa double-liaison, ses contrats, son enfant "légitime" décédé, et la présence de son enfant "hors-mariage" qui questionne son héritage... Le portrait est complet), les rares moments de courses automobiles font un bien fou (avec le point culminant du film :
l'accident sur les badauds...
On a arrêté de respirer), les décors sont filmés comme une Italie en plein été (un ensoleillement constant qui fait du bien aux rétines pour contraster les disputes volets fermés des deux couples), et on a eu pitié de la courte histoire de son petit garçon qui ne comprend même pas le nom de famille qu'il doit porter, qui voit "Papa Ferrari" tous les 36 du mois, à qui le film dédie la dernière scène en concluant sur
sa découverte de son demi-frère décédé
, et qui, malgré tout, rapporte tous ses problèmes à celui, innocent, d'obtenir un autographe de son pilote préféré... Michael Mann est très bon dans l'exploration des psychologies de ses personnages, ce qui donne un film Ferrari pour nous mille fois moins intéressant que Le Mans 66 (on ne peut s'empêcher d'y penser), mais terriblement honnête, à qui on n'a pas le cœur de reprocher son audace de prendre l'attente du spectateur (voir et comprendre les voitures Ferrari) à revers (il en fait des faire-valoir lointains, cachées par le Monsieur). Le tour de piste n'est pas décoiffant, mais ramène Michael Mann à l'écurie de ce qu'il sait faire : de bonnes psychos.