Attention, cette critique se base sur le twist final, élément essentiel de compréhension de toute l'oeuvre.
Le principal défaut de Chasseuse de géants ne tient pas du fait des artistes en charge de le mettre en oeuvre; non, il concerne surtout la promotion faîte pour le vendre un minimum. Désireux de le faire passer pour un énième blockbuster qui porterait cette fois sur le thème de la chasse de géants, sa campagne de publicité a lamentablement échoué dans ses projets, provoquant l'échec instantané d'un film aliéné dès sa sortie, film d'auteur à twist passé pour un énième début de franchise à grand succès.
Bien plus profond que ce à quoi l'on pouvait s'attendre, I Kill Giants adapte en fait le comics éponyme de Ken Nimura et Joe Kelly, et le fait de plutôt bonne manière. Visuellement très soigné, il base tout son déroulé sur le tiwst final à moitié prévisible mais tout de même très efficace, puisque révélé, joué et filmé avec talent.
Lent, long, à la limite du supportable tant il semble ne jamais avancer ou se perdre trop souvent, le travail d'Anders Walter joue avec son spectateur comme avec ses personnages, lui faisant ressentir ce qu'éprouvent finalement ses protagonistes, lui assenant ennui, lourdeur et atmosphère suffocante par ses couleurs ternes, soit ce que ressent l'héroïne de notre histoire, pauvre fille marginale et rêveuse en proie au pire des drames.
On parle là du décès prochain d'un proche, et de la maladie actuelle d'une mère; pessimiste à l'excès, il dévoile petit à petit son jeu, ses ficelles pour nous assener un coup de théâtre bien pensé, émouvant et marquant, permettant avec talent d'assener une relecture à un film qui pouvait pourtant paraître insupportablement lent.
Bémol : si les dernières vingt minutes apporteront un intérêt non dissimulé à l'oeuvre entière, il n'empêche que tout le reste, se noyant dans sa volonté de tout rendre terne, n'intéresse finalement que très peu, pêchant par un manque de rythme incroyablement excessif, quand il ne choisit pas finalement d'exprimer tout ce qu'il a pu apprendre des bouquins de comportement des hommes en stade de deuil. Et si la reconstitution psychologique est très fidèle, on ne pourra pourtant s'empêcher de se demander quand le film avancera enfin, quand il ne campera plus sur ses positions de toujours aller de l'avant à reculons.
Dans l'idée, Chasseuse de géants est proche d'un Tueurs Nés : avec la volonté de marier forme et fond, il réussit son approche artistique en perdant le spectateur qui, aussi là pour passer un bon moment, rejette finalement (ou non, c'est au choix) un procédé visuel ayant pour but de marquer l'esprit en imprimant ce que vivent les personnages, ce qu'ils pensent et ce qu'ils font directement dans les yeux de son public.
Mais pour réussir, il aurait fallu la justesse d'un Valhalla Rising ou d'un Samouraï, le visuel de Villeneuve ou d'un Scorcese; manquant de cela, il se rate à la fois dans son fond et dans sa forme, nous livrant des monstres géants aux designs bâclés et peu détaillés, sorte d'amas de pierre imprécis qui font ressortir la mauvaise qualité des CGI, peu propice au succès public auquel sa campagne de com tentait de le soumettre.
Casse-gueule, mensonger, Chasseuse de géants n'a clairement rien du film d'action pour lequel il tente de se faire passer jusque dans son affiche finale. Au lieu de cela, c'est un petit film d'auteur au budget correct qui se consacre plus à la psychologie de ses personnages, à leur interaction entre eux, à l'évolution qu'il connaisse au fur et à mesure de l'avancée de la maladie de la mère, qu'à l'action, au bourrinage intense qu'il nous promettait. Une expérience certes, mais qui pourra vous laisser sur le bas côté si vous n'êtes pas un minimum persévérant avec les films lents.