« Tous les hommes naissent innocents, mais ils deviennent tous coupables » ; cette petite phrase à peine culpabilisatrice participe à l’ensemble des réflexions qu’entraîne la vision de ce film…néanmoins, il est impossible de ne pas remercier certains hommes d’être devenus coupables, à commencer par Melville. Car oui, pour faire un tel chef d’œuvre, cela vaut bien la peine de ne plus être innocent !
Le cercle est la forme de la perfection. Et c’est cette forme qu’épouse le film, plus de deux heures durant.
Perfection des plans. Ou comment la parole est superflue, et les yeux d’un Maître suffisent à tout dire, avec une sobriété déconcertante, dans des tons gris bleu. La scène du billard est grandiose, et elle est loin d’être la seule ! Le travail sur le son accompagne bien cette perfection. Melville présente ses personnages en laissant toujours une zone d’ombre (c’est le cas de le dire, quand on se rappelle de Delon à un certain moment), et en en faisant des êtres complexes, dont le passé tend toujours à ressurgir.
Perfection de la direction des acteurs. Qui valait bien quelques tensions durant le tournage ! Je pense particulièrement à Bourvil, dont c’est l’un des derniers rôles. Il est éclatant de sobriété, et transmet une émotion bien plus intense que celle d’un inspecteur lambda. A Delon, dont la beauté impénétrable conserve le mystère spirituel du film. Et, aussi à Montand, et à Gian Maria Volonte, bien sûr.
Perfection du montage. Ou comment une histoire apparemment simple, apparemment linéaire, trouve toute sa puissance dans la capacité de Melville à faire des connexions entre les personnages, les lieux, en maîtrisant les temporalités sans ne jamais ennuyer.
Après avoir vu un tel film, on se dit « oui, j’ai vu quelque chose de grandiose. Et je me sens si petit, moi, à côté… »
La seule consolation, c’est de savoir que, en tant que spectateur, en tant que petit homme, en tant que rien de tout…on finira par entrer dans le même cercle que Melville, ce loint