Alain Delon en homme amer, Bourvil en commissaire glacial, Yves Montant en bandit ex-flic, Gian Maria Volonte en criminel endurci. Tous réunis dans un polar sorti des ombres qui se cache sous les immeubles austères de Paris.
Un train bleu, un contraste parmi tant d’autres dans cette grisaille écartelée. Un train ou le suspens monte déjà et ou le visage de Bourvil semble aussi inoubliable que cette atmosphère cinglante et cinglée. Cinglée comme ce prisonnier qui saute du train en marche pour courir dans la boue tandis que Alain Delon retrouve une liberté non acquise dans une ville vide et sans âme. La course poursuite s’engage alors entre le commissaire peu recommandable et les deux fourbes en liberté, prêts à en découdre pour atteindre leur objectif : un braquage spectaculaire dans une haute bijouterie de la place Vendôme.
Melville met non seulement en avant une mise en scène extraordinaire, mais donne en plus à son film une force extrême au niveau du suspens, « Le Cercle Rouge » ou le summum d’une tension permanente qui atteint son point culminant lors de la scène du braquage se fait pourtant sans un bruit. Comme si le cercle devenait silencieux, sourd, fatal.
Ici, les hommes succombent au viol de la loi. La seule chose qui distingue le flic du criminel, c’est l’humanité. Cette humanité qui pousse à faire de quelqu’un un criminel, cette humanité qui nous fait naitre égaux pour nous faire prendre des chemins différents. Cette humanité, cette saleté qui emprisonne les hommes contre leur gré, qui diffère en chacun de nous.
Ce désespoir que tout le monde subit, ce cercle rouge jamais ne le détruit, ce cercle de la fatalité. L’image est vraie, à la fin, quand on dépasse le jeu des acteurs, quand certains finissent contre la terre, et l’autre se tourne vers le ciel et dévisage la lumière. Car comme disait Louis Jouvet « Les personnages existent avant les acteurs », ceux que l’on voit défiler à l’écran, sont des artistes, des visages au sommet, celui de Bourvil, qui porte à ses chats une tension et une tendresse qui ne suffisent, celui de Alain Delon, volontairement inexpressif pour rester dans l'anonymat et la sobriété.
Finalement arrivé à la fin, je fais comme ce survivant, je regarde avec admiration le générique couler, en me disant que je viens de voir l’un des plus grands thrillers que le cinéma ait pu offrir. S’échappant de ma volonté pour passer entre les mailles d’un filet fait de pierre, qui couvre les limites d’un cercle défendu.