Le football féminin n’a, à ma connaissance, jamais fait l’objet d’un long-métrage en France et il était temps. Julien Hallard a choisi le mode le plus facile et le plus accessible pour parler de son sujet, la comédie. Son film, qui dure précisément le temps d’un match de football (90 minutes, je précise…) fonctionne en grande partie pour plusieurs raisons. D’abord il est drôle, ce qui pour une comédie est la moindre des choses. Je ne dis pas qu’on se marre du début à la fin mais on sourit beaucoup, on rit même franchement parfois aussi devant « Comme des Garçons ». Pas de baisse de rythme, pas de temps morts, le film se tient bien, coloré par une bande originale sympathique qui fait la part belle aux tubes de l’époque. La reconstitution est soignée, notamment dans costumes et surtout dans ceux de Paul Coutard, véritable fashion-victim de l’époque (ah, le pantalon blanc et les bottines à talonnettes…), brushing inclus. Le casting est également un des points fort de « Comme des Garçons », dans ses deux rôles titres (Max Boublil et la charmante Vanessa Guide) mais aussi dans la multitude de seconds rôles qu’il propose, des seconds rôles bien écrits et bien mis en valeurs. C’est loin d’être toujours le cas dans les films français d’aujourd’hui, où on a tendance à braquer la caméra devant les acteurs « bancable » plus que nécessaire. Max Boublil en fait beaucoup, il frôle la caricature parfois, mais l’un dans l’autre, tout bien considéré, il campe un Paul Coutard attachant. Macho et prétentieux au début, doté d’un vrai flair en terme de football (mais pas en terme de rock n’roll !), son personnage évolue, il s’attache à l’équipe, il revoit ses préjugés, il devient le promoteur du football féminin alors qu’il a tout à y perdre. Même s’il le fait un peu pour les beaux yeux d’Emmanuelle, il se met en danger et son personnage s’adoucit, au point de devenir attendrissant sur la fin. Emmanuelle, elle, a une vraie personnalité de femme moderne à une époque où il était surement mal vu de l’être. Volontaire, intelligente mais un poil complexée, elle vit en secret son amour du football dans une société qui ne le comprend pas. Le scénario est sans surprise, c’est vrai. Les rebondissements sont prévisibles, l’histoire d’amour qui se noue est cousue de fil blanc et bordée de jolies fleurs bleues, le triangle amoureux qui va mettre l’équipe en danger est tout sauf original. Mais j’ai envie d’être indulgente avec le film de Julien Hallard car lui aussi, à sa manière, est un pionnier. Le football féminin, il y a encore tellement de personne que ça fait doucement rigoler. Plus personne ne songerait à l’interdire, évidemment, mais la condescendance qui accompagne les footballeuses est encore palpable partout : dans les medias, dans les clubs pro et amateurs, dans les tribunes. Dans le féminisme, il n’y a pas de petite victoire et pouvoir jouer au football, prendre une licence, éventuellement devenir pro, c’est une victoire du féminisme, une parmi d’autre, et ca a peut-être été une des plus difficile à remporter. Même si son scénario est un peu « mou du genou », j’ai envie de le défendre, ce film. « Comme des Garçons » brosse le portrait d’une époque patriarcale qui n’en finit pas de mourir, ces femmes était des pionnières, elles ont enfoncé un clou dans le cercueil du machisme, mais le cadavre bouge encore… Sous ses airs de comédies et de légèreté, « Comme des Garçons » traite d’un vrai sujet, bien moins anecdotique qu’on ne l’imagine. C’est 1h30 de cinéma agréable, avec du fond et sans prétention ; bref, un bon plan cinéma, qu’on aime le foot ou pas !