Là voilà enfin, “la comédie de l’année 2018”, déjà annoncée comme telle avant même sa sortie en salles. Comme toujours, on se méfie un peu des annonces triomphalistes, qui sont souvent l’annonce implicite d’une solide déception mais là, je dois dire que ‘Le grand bain’ réussit plutôt bien son coup, vrai film d’auteur mais film d’auteur authentiquement populaire. De quoi ça parle, ‘Le grand bain’ ? Tout simplement d’hommes au bout du rouleau qui vont reprendre leur vie en main en formant une équipe de nage synchronisée masculine, secondé par des coaches féminines qui en ont bien bavé elles aussi. L’idée peut sembler saugrenue mais donne le ton à un film parfois amusant et souvent touchant. Contre toute attente pour un premier film dont il est metteur en scène, scénariste et dialoguiste, Gilles Lellouche s’en sort plutôt bien, principalement parce qu’il n’a endossé le costume de “l’auteur” que d’un point de vue pratique et pragmatique, loin de tout snobisme et de toute posture. Dans ses portraits d’hommes et de femmes cassés par la vie, Lellouche ne cherche pas la complexité, l’implicite ou le sous-entendu : il veut que ses personnages soient lisibles, compréhensibles, que le public, tout le public, puisse se mettre à leur place...et atteindre cet équilibre idéal est somme toute aussi difficile que d’atteindre la sophistication et la profondeur qui seraient les caractéristiques des grands auteurs. Quant à l’humour, il est là, parfois maladroit, le plus souvent revigorant, mais ne transforme jamais le propos en grosse farce ou en comédie d’(aqua)boulevard. Lellouche est bien aidé par un des plus beaux castings français de l’année : Amalric est un dépressif au chômage, Canet, un sanguin négativiste dont la vie part en lambeaux, Anglade un musicien raté, Poelvoorde un entrepreneur incompétent au bord de la banqueroute et Katerine joue - magistralement mais joue-t-il, seulement ? - le rôle du brave type un peu simple dont tout le monde se paye la tête : chacun, à sa manière, parvient à “trouver” son personnage et à lui conférer une vraie carrure et une vraie épaisseur, sans refuser qu’il plonge dans des situations embarrassantes mais sans que jamais le spectateur n’éprouve envie de mépriser ou de ricaner à ses dépens Par sa simplicité, par sa bonne humeur, par son excentricité et sa capacité à faire briller des personnages à la fois pathétiques et attachants, ‘Le grand bain’ adopte en fait une approche très anglo-saxonne - ‘The full Monty’ n’est pas loin - et s’impose comme un de ces feel-good movies encore trop rares au sein de la production française, certes pas parfait mais incontestablement prometteur.