Cinéphile depuis son enfance, Edgard Morin s'est véritablement consacré au cinéma à partir de 1951, lors de son entrée comme chercheur au CNRS. Il commence alors des recherches anthropologiques sur le 7ème art, c'est à dire sur sa signification sur le plan humain. A cette période de sa vie, il peut aller jusqu'à voir plus de 4 films par jour : "A cette époque, plus je vois de films à la suite, plus ça me plait, jusqu’à saturation !"
Les réalisateurs d'Edgar Morin, Chronique d'un regard, n'en sont pas à leur coup d'essai, car ils avaient déjà mis en scène un documentaire se concentrant sur un réalisateur en particulier, en 2012. Il s'agissait de Jean-Luc Godard, le désordre exposé.
Edgar Morin, Chronique d’un regard est le troisième film co-signé par Céline Gailleurd et Olivier Bohler. Au travers de leurs films, ils étudient la notion de portrait, et privilégient la pensée et l'esthétique plutôt que la chronologie. Dans l'élaboration d'un projet, l'utilisation des archives est pour eux primordiale.
L'idée de faire un documentaire sur un cinéphile spécialiste des plans, et que lui-même en soit acteur, est un processus relativement novateur. Pourtant, il a séduit le principal intéressé : "Les auteurs de ce film ont eu l’idée, étrange et intéressante de faire un film sur un cinéphile, sur mon goût pour les images. Et moi-même, qui écris sur les images, je deviens une partie de ces images dont je parle. Il y a donc un phénomène de dédoublement. (...) Ce thème du double, j’y suis très sensible."
Edgar Morin et Jean Rouch ont collaboré pour la réalisation du documentaire Chronique d'un été en 1960. Ce film marque l'arrivée de la prise de son direct sur les caméras. Cette révolution au sein de la technique du cinéma permettra de donner lieu à un bouleversement sur l'Histoire du 7ème art. C'est pourquoi, Céline Gailleurd et Olivier Bohler ont choisi de mettre en évidence ce moment important de la vie d'Edgar Morin. Le titre "Chronique d'un regard" fait par ailleurs peut-être le lien avec le film réalisé aux côtés de Jean-Rouch.
Avec une moyenne de quatre films par an, Mathieu Amalric n'a pas hésité à donner son accord pour tourner dans le documentaire de Céline Gailleurd et Olivier Bohler, Edgar Morin, Chronique d'un regard. Alors que la caméra se promène dans Berlin, puis Paris et se déplace avec Edgar Morin, la voix d'Amalric accompagne les images et nous fait découvrir des textes écrits par Morin entre 1956 et 1962.
Dès les premières images du film, Mathieu Amalric lit, dans un café, les textes fondateurs d'Edgar Morin sur le cinéma. C'est en fait un hommage à peine dissimulé au Saint Germain des Prés que fréquentait beaucoup le cinéphile, notamment lors de la période d'après guerre. On pouvait à l'époque y croiser à ses côtés des personnalités telles que Marguerite Duras.
Le tournage d'Edgar Morin, Chronique d'un regard s'est déroulé dans deux grandes capitales d'Europe, à Paris, au Musée du Quai Branly et à Berlin, au Musée du cinéma. Dans le documentaire, la vision de la ville a été mise en avant, à travers la projection des films qui ont marqué la vie d'Edgar Morin, sur le toit ainsi que les murs des villes.
Les deux réalisateurs préparent actuellement un court métrage de fiction, "Dramonasc", une histoire d’amour tragique entre deux adolescents, autour du barrage de Serre-Ponçon.