Même si il se fait de moins en moins prolifique, le western reste un genre qui se refuse à mourir et il revient de manière récurrentes sur nos écrans. Quentin Tarantino à prouvé ses dernières années qu'on pouvait encore en tirer quelque chose de rafraîchissant, preuve que le western avait encore son mot à dire mais ses films font souvent offices d'exceptions. Entre les insipides remakes comme The Magnificent Seven de Antoine Fuqua ou le très mou Jane Got a Gun de Gavin O'Connor, le western montre qu'il n'a plus la force d'antan. Faute principalement à un savoir-faire qui s'est quelque peu perdu. Dorénavant, on se tourne vers les westerns européens pour essayer de retrouver ce frisson d'époque que l'on éprouvait devant les Peckinpah, Leone, etc. Dernièrement, le western danois The Salvation avait su être sympathique même si il avait des ambitions restreintes et que le rendu était parfois proche du DTV (la où fini plus de la moitié de la production du genre), il possédait néanmoins des moments très efficaces. Ce Brimstone vient s'inscrire dans cette lignée, western hollandais dirigé par Martin Koolhoven, qui s'est fait connaitre en 2008 avec son Winter in Wartime, et il dispose d'ambitions beaucoup plus nobles et importantes mais peine à leurs donner corps.
Récit gargantuesque de presque deux heures et demi, découpé en quatre chapitres qui défile dans un ordre non chronologique, le film s'impose comme une vaste fresque dont le spectateur devra faire le travail de la reconstituer. La manière de mettre en forme le film se révèle donc audacieuse et permet vraiment de maintenir le spectateur éveillé même lorsque l'intrigue se perd un peu en digressions. On ne peut quasiment rien reprocher sur le travail effectué par Martin Koolhoven sur le visuel de Brimstone. Accompagné d'une sublime photographie, la mise en scène brute se montre sans concessions notamment dans sa manière d'aborder frontalement la violence, qu'elle soit physique ou psychologique. En ça, le film pourra facilement choquer mais jamais elle n'est utilisé de manière pleinement gratuite. Le tout se voit donc englobé par une atmosphère oppressante qui donne à l'oeuvre des contours gothiques même si malheureusement Koolhoven n'embrasse jamais vraiment cet aspect. A trop vouloir s'ancrer dans une mise en image très âpre, il passe un peu à côté de l'aspect mystique de son histoire et embrasser une forme plus onirique aurait peut être pu lui éviter le ridicule de certaines situations trop terre à terre malgré une écriture parfois grandiloquente. Surtout que c'est dans sa manière très posée de faire bouger son récit que le réalisateur impressionne, pas lorsqu'il essaye de s'approprié les séquences classiques qui font un western. Néanmoins il arrive à détourner avec ironie et malice certaines situations attendues, comme les passages avec Kit Harington en bandit au grand cœur.
Pourtant malgré la forme maîtrisée et qui offre de très beaux moments, l'écriture peine à suivre. Le tout démarre assez bien, le premier chapitre est énigmatique et tendu mais plus le récit avance et plus celui-ci tombe petit à petit dans le ridicule. Le prêcheur, incarné par un Guy Pearce habité, est tout d'abord inquiétant à souhait mais il devient de plus en plus caricatural et grotesque au fur et à mesure de l'histoire. Ces derniers instants dans le film, se révèlent gênants dans le mauvais sens du terme, où même le talent de l'acteur ne parvient plus à limiter les lacunes d'écritures. Car pour faire passer son message féministe, Koolhoven est prêt à aller très loin et il y va le plus souvent sans la moindre once de subtilité. Faisant subir les pires atrocités à son héroïne, superbe Dakota Fanning, pour symboliser la place difficile de la femme dans la société, où celle-ci doit constamment se battre pour survivre, il loupe pour autant le coche de se qu'il veut dénoncer. A être trop dans la mécanique de l'hyper-violence, il en délaisse l'émotion et peine à nous attacher à ce parcours chaotique mais qui n'atteint jamais les sphères tragiques. Pourtant on sent véritablement la condition opprimé des femmes que ce soit par la loi ou par la religion. Jamais celles-ci n'ont le bon rôle dans une société qui les voit comme au mieux des biens à posséder ou au pire comme des êtres impurs à châtier. La réflexion autour du radicalisme religieux n'est d'ailleurs pas dénué d'intérêt, et montre la dangerosité et la pensée arriérée de ceux qui dévouent leurs vies à une entité supérieure. La croyance d'être mieux qu'un autre est un des croyances les plus dangereuses au monde. Mais malheureusement, Koolhoven préfère évoquer cela sans la moindre finesse et fait perdre toute vraisemblance à son film qui devient petit à petit un assemblement de situations plus atroces les unes que les autres.
Brimstone est un western décevant. Malgré un début vraiment engageant, celui-ci se désagrège au fur et à mesure de son avancé. La réalisation à beau être impeccable, on à du mal à se laisser prendre par l'ensemble qui loupe le coche du divertissement westernien et qui passe à côté de son aura mystique. Malgré le talent des deux acteurs principaux qui se donne complètement dans l'entreprise, le ridicule de certains passages ne s'atténue pas. Le manque de subtilité de l'écriture fait souvent tomber l'histoire dans le grotesque et à défaut d'être la fresque féministe épique que Brimstone aurait pu être, on est face à un B movie qui tire vers le Z et qui brille par son ironie décomplexée. De belles séquences de cinéma font quand même leurs apparitions ici et là et la première heure de film est suffisamment aboutie pour rendre l'ensemble relativement convenable.