Épuisée par tous ces humains qui la détruisent, notre bonne vieille Terre a décidé de changer drastiquement de climat pour les éradiquer et assurer sa survie. Pas vraiment fan d'un air rempli d'ammoniac, la population restante s'est exilée sur Io, lune de Jupiter, pour en exploiter les ressources géothermiques en vue d'une installation sur une potentielle exoplanète capable de les accueillir. Néanmoins, quelques humains ont choisi de rester volontairement sur Terre dans les rares poches d'oxygène qui subsistent à cause du discours d'un scientifique persuadé que la solution de notre survie viendra de notre planète elle-même si l'on trouve la solution pour s'adapter aux nouvelles conditions de son atmosphère. "Io" nous place donc au côté de la fille de ce dernier dont l'errance dans un monde déserté de ses habitants n'a que pour unique but de poursuivre les recherches de son père et donc prouver qu'il y a un encore un moyen de rendre à nouveau viable le développement de la vie sur Terre. Avec pour seul contact une correspondance avec Elon, un ingénieur parti sur Io, la vie solitaire de la jeune femme est soudainement interrompue par l'arrivée de Micah, un homme à la recherche du père scientifique et en partance pour une des dernières navettes décollant vers Io...
Forcément, dès le départ, "Io" clivera une grande partie des spectateurs par son approche plus qu'intimiste du cadre habituel d'un futur post-apocalyptique. Ici, point d'action à gogo où il serait question d'aliens ou de lutte entre des clans de survivants, non, "Io" se focalise avant tout sur la rencontre sentimentale de deux personnages aux points de vue diamétralement opposés sur le moyen de continuer à survivre. Mais, à vrai dire, même si on est plutôt friand de ce genre de mise en perspective dans le genre, le film partagera sans doute encore un peu plus sur la teneur de son sujet et surtout son inconsistance à tenir vraiment la route sur la durée d'un long-métrage. Lorsque l'on comprend où tout ça veut en venir, force est de constater que "Io" ne propose pas grand chose de neuf et se met rapidement à tourner en rond jusqu'à friser les dangereuses frontières de l'ennui et de la référence vaine. Il n'y a pas grand chose à reprocher aux deux acteurs (Margaret Qualley et Anthony Mackie sont plutôt bons même s'il manque clairement une bonne dose d'étincelles entre eux) ou même à la réalisation très convaincante aussi bien sur la manière de retranscrire cet avenir que sur l'ambiance désespérée qu'il véhicule mais, autant de le dire, la majeure partie de "Io" peine à vraiment passionner. Si la première partie mettant en scène la solitude de Sam dans ce cadre est plutôt prenante quant à la compréhension de la quête poursuivie par le personnage, l'arrivée de Micah ressert la dynamique autour de thématiques qui le sont beaucoup moins. Évidemment que l'opposition découlant de la forme de survie à adopter (sur Terre ou dans les étoiles) est une question difficile à trancher et le film l'explore assez judicieusement dans toutes ses ramifications mais il le fait au travers de cette simple rencontre entre Sam et Micah, véhicule d'un amour naissant et de visions antagonistes sur le sujet. En attendant que les personnages se guérissent mutuellement de leurs petits traumas respectifs pour mieux s'unir, "Io" va les rapprocher dans une enfilade de conversations sans fin citant Platon ou T.S. Eliot, où l'on admire des tatouages de molécules en guise de dragouillage et où la référence constante à la mythologie grecque devient carrément plombante (en plus des clins d'oeil appuyés aux mythes de Io et de Léda, Sam lit un bouquin sobrement intitulé... "Mythologie"). On en viendrait presque à espérer que Jupiter apparaisse vraiment pour transformer un des protagonistes en animal et ainsi les bousculer un grand coup tant "Io" s'enferme dans une profondeur totalement artificielle pour masquer la faiblesse de son sujet qui, de toute évidence, ne trouvera sa finalité que dans les derniers instants. Et ce sera d'ailleurs le cas, la dernière partie, elle, touchera enfin à l'intelligence et à la poésie auxquelles le film tentait de faire croire grossièrement jusque-là en confrontant enfin le point de vue irréconciliable des protagonistes dans une forme de compromis plutôt bien pensé en jouant avec l'interprétation tout autant optimiste que pessimiste que l'on voudra bien lui donner.
"Io" n'est certes pas un pionnier en matière de SF post-apocalyptique intimiste et, pour peu que l'on ne soit pas réfractaire à ce genre d'approche, les questions qui l'animent avaient de quoi séduire. Seulement, le film souffre des mêmes défauts habituels qu'une production Netflix ayant une vision de blockbuster sur le sujet : se contenter d'une certaine efficacité pour assurer le minimum sans réelle prise de risque en matière d'originalité. Pour un "gros" film, cela peut être plus pardonnable par le divertissement qu'il procure mais, pour un long-métrage animé par une volonté auteurisante, cela se remarque beaucoup plus rapidement, surtout quand l'ennui et une intelligence au trait bien trop forcée pour être honnête prennent le pas sur l'âme qui aurait dû habiter "Io" et nous y emporter complètement...