Le film s'inspire de la vie de Florence Foster Jenkins. "Une évocation libre", pour reprendre les termes du réalisateur, de la vie de cette femme qui, grâce à sa fortune, est allée jusqu'au bout de ses rêves, en chantant sur scène, en enregistrant des disques, avec une voix qui n'aurait permis à aucune autre de faire parler d'elle.
Le film de Xavier Giannoli transpose l'action dans les années 20. Une reconstitution soignée les décors sont luxueux et les costumes somptueux. Les dialogues superbement écrits sont riches. Entre moments de pure folie ils sombrent dans la dérision avant de virer dans le pathétique. Quelques rire, à l'insu de la principale protagoniste, sont vite étouffés par des situations qui s'enchaîent entre ridicule et pathétique.
La mise en scène est grandiose. Pour mieux se rapprocher de sa source d'inspiration, le scénario abuse de quelques invraisemblances. Comment imaginer que cette femme, fervente admiratrice d'art lyrique, experte de ce monde particulier du bel canto, n'entende pas sa propre voix ? Le réalisateur laisse planer le doute.
Le principal est ailleurs. Dans l'horrible solitude d'une femme mal entourée et prête à tout pour vivre son rêve. L'hypocrisie, le mensonge et la lâcheté règnent à tous les niveaux. Est-ce pour Marguerite le seul moyen de vivre ? Est-elle réellement dupe ? La vérité serait-elle plus cruelle que le mensonge ? La lumière vacillante d'un lustre, bousculé par Marguerite, laisse planer le doute sur un certain désarroi qui semble pointer temps à autres. La lumière deviendrait-elle cruelle ? Incertaine ?
"On sait aussi que les années 20 sont un moment important dans l’aventure de la liberté, tant en art qu’en matière de mœurs. Je voulais que mon personnage s’arrache à quelque chose d’un ancien monde qui l’a empêché de s’accomplir et du nouveau qui va la perdre." a déclaré Xavier Giannoli.
L'excellent Denis Mpunga, dans le rôle du fidèle majordome, entretient avec adoration, une certaine protection aussi, la folie de Marguerite. Dans quantités de photos son œil magnifie le modèle. Par amour ou pour mieux attirer le regard de celui qui s'est détaché de sa femme ?
Dans le rôle de l'époux volage, André Marcon excelle. À la fois lâche, faible et dépité, il ne tentera rien pour décourager celle à qui il doit tout.
Le personnage trouble, incarné par le remarquable Michel Fau, fait basculer le film dans une cruauté totale.
Dans un rôle démesuré et difficile Catherine Frot, à la fois troublante et touchante, irradie de la première à la dernière image. Elle est tout simplement magnifique. Cette Marguerite est un très beau rôle pour une grande comédienne. Catherine Frot triomphe.