Attention! Cette critique est un spoiler géant. A lire plutôt après qu'avant avoir vu le film !
Quatre étoiles pour la très grande tendresse qui se dégage du magnifique personnage de Marguerite. Marguerite est riche, immensément riche, et ne vit que pour le chant qu’elle vénère. Pourtant, malgré des années d’échec, de refus et d’excuses embarrassés de son auditoire payé à l'aimer, Marguerite ne sait pas que du talent, elle n’en a aucun et n’en aura jamais.
C’est Lucien Beaumont, le jeune journaliste critique qui dès le début du film en donne le ton. Il réplique à Hazel, une jeune chanteuse qui lui reproche d’avoir éreinté de sa plume l’une de ses amies pour la faiblesse de sa voix que « Ca lui fera du bien ».
Marguerite n’aura pourtant pas droit à cette chance, qu’on lui dise la vérité, qu’un Lucien Beaumont ait le courage et l’amitié de lui dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas : elle est bien trop riche, et il y a bien trop à gagner à profiter de ses largesses. Il se dégage un double sentiment de ce film : la culpabilité et l’injustice. La culpabilité, c’est celle qui, insidieuse, finit par se développer chez tous ceux qui entourent Marguerite, torturés entre l’affection qui se développe chez eux pour cette femme qui ne connaît pas le mal, le cynisme auquel ils cèdent par faiblesse, et une lâcheté qui ne connaît de limite que leur propre confort.
Ce n’est pas le médecin qui à la fin la tue en lui faisant écouter ses propres enregistrements, ce sont tous ceux qui, depuis toujours, l’entourent et se taisent.
Quant à l’injustice, c’est celle du don, entre une jeune Hazel, née avec une voix d’ange, et la pauvre Marguerite, qui ne maîtrisera jamais son organe malgré une énergie de naufragée. Marguerite est riche, mais on lui pardonne tout, car en dépit de ses millions, elle est d’une désarmante authenticité.