Parce qu'il a le mérite de poser ses caméras loin de la superficialité des grandes villes (Paris, pour ne pas la citer) et, surtout, les fixer à hauteur d'homme, T.Lilti reprend, après "Hippocrate", son immersion dans les coulisses de notre médecine française avec ses vérités et ses silences. Son expérience en milieu hospitalier justifie et rend objectif son propos, d'autant qu'on ne sent pas chez lui du pur militantisme, ce qui fait de "Médecin de Campagne" un film sincère et audible. Oui, le désert médical y est évoqué, l'investissement professionnel sans limite (de soi, comme de temps) est un vecteur constant, mais ici raconté auprès de "vrais" gens, de vrais et simples quotidiens, sans vraiment de filtre, et encore moins d'élitisme. Et comme le réalisateur ne joue pas la carte du documentaire et du témoignage pur, il n'en oublie pas de mettre en scène des personnages avec leurs caractères et leurs émotions (certes un peu retenues, mais réelles). A ce titre, le duo F.Clusez (qui n'en fait pas trop cette fois-ci, la justesse lui va à ravir) - M.Denicourt (d'une classe brillante) fonctionne à merveille, leur relation à construire sert de joli fil rouge tout au long du film. Mais "Médecin de Campagne" n'évite pas certaines maladresses qui le sortent un peu des rails de la noble sobriété de son message: un peu démago quand il évoque le sujet de l'hôpital en opposant deux visions de la médecine, pas bon lors de l'intervention d'urgence suite à l'accident du maire, puis un final un peu à l'eau de rose qu'on aurait pu éviter. Cela ne gâche absolument pas ce film, mais son ton finalement gentillet prend un peu plus le pas, et tempère la force et la sincérité de son propos. Mais on ne se privera pas de cette oeuvre sincère et intelligente dotée d'une réelle empathie.