Auteur et réalisateur de l’excellent « Hippocrate », Thomas Lilti revient avec un nouveau film « médical ». Sauf qu’il ne s’agit plus d’un interne à l’hôpital mais d’un généraliste à la campagne. Dr Werner (François Cluzet, hyper crédible) exerce son métier sacerdoce dans un petit cabinet où il alterne consultations et visites à domicile à un rythme épuisant. Malgré la tumeur qui lui ronge le cerveau, il refuse de lever le pied en dépit des injonctions de son cancérologue. Un jour, pourtant, débarque Dr Delezia (Marianne Denicourt, parfaite), une ancienne infirmière, nouvellement médecin, venue lui prêter main forte. Très réaliste dans sa description de la médecine rurale (on pense à « La Maladie de Sachs », le beau livre de Martin Winckler, adapté au cinéma par Michel Deville en 1999), le film rend un vibrant hommage à ces hommes et ces femmes qui vivent leur métier avec passion et abnégation. Corvéables à merci, ils répondent présents à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, la conscience professionnelle vissée au corps et au cœur. C’est aussi, bien que Thomas Lilti s’en défende, un film politique qui évoque en filigrane les déserts médicaux et leurs conséquences délétères sur les populations paysannes. Mais MÉDECIN DE CAMPAGNE est surtout le portrait sensible et complexe d’un homme souffrant, buté et pétri de contradictions. La description de sa vie au quotidien, son isolement, son environnement, ses doutes et ses questionnements m’ont captivée de bout en bout. Les relations avec ses patients, riches, douloureuses, parfois inextricables, sont décrites avec beaucoup d’humanité et de finesse. Les liens intenses qu’il tisse avec sa consœur, entre séduction passive et mise à l’épreuve, évitent toutes les facilités qu’on pouvait craindre dans ce genre de confrontation. Un film subtil que je vous recommande.