Le programme de mon cinéma précisait "drame historique expérimental". Qu'à celle ne tienne, l'accueil critique quasi unanime au moment de sa présentation à Cannes restait en écho dans ma tête, augmenté par l'envie de voir Jean-Pierre Léaud dans un vrai rôle de composition. Donc, confiant, je me suis embarqué pour presque deux heures au chevet du roi soleil mourant.
Au début, Louis XIV n'est plus au top de sa forme. Alité, il perçoit encore les échos de quelques fêtes données dans la pièce d'à côté où courtisans et politiques devisent presque gaiement, passant de temps en temps la porte restée ouverte pour venir auprès de lui avec une empathie assez fabriquée. Mais bientôt, la chambre sera réservée aux seuls médecins, membres du clergé ou très proches. La gangrène semble prendre le pied du souverain qui perd l'appétit et s'enfonce dans l'apathie. Puis viennent quelques râles, gémissements de douleurs. La gangrène est bien là, gagnant rapidement toute la jambe malgré les traitements de la dernière chance ( un élixir donné par un charlatan, composé de jus de grenouille, de liqueur de cerveau de nouveau né et de couille de taureaux...ou quelque chose d'approchant ). On s'achemine vers le terme de la vie du roi. L'appétit a déjà disparu, ses biscottins accompagnés de vin d'Alicante ne le contentent plus. Louis XIV ne parle plus, ne gémit plus. L'extrême onction est demandée...
Je ne vous raconte pas la suite pour ménager le suspens...
C'est certain, ce film est une expérience ! Nous sommes vraiment au chevet du roi pour suivre son agonie. A part une scène introductive, nous ne quitterons jamais la chambre, unique décor ( très soigné) du film. Seule la caméra, imperceptiblement, de plans en plans, se rapprochera du mourant. Autour de lui, tout est silencieux, compassé. Les quelques paroles prononcées par ceux qui l'accompagnent dans ses dernières heures, sont accompagnées de gestes lents et cérémonieux. La politique n'existe plus, seul un vague achat pierres égyptiennes sera évoqué. Le film, assumant une certaine lenteur, laisse alors le spectateur face au spectacle de la mort. On peut s'ennuyer, trouver cela un peu trop radical ou laisser son esprit vagabonder. Ce long calvaire remet en perspective le statut de tout être humain. Roi ou paysan, face au trépas, nous sommes tous à égalité. On ne sait plus qui du monarque ou de Jean-Pierre Léaud, perruqué avec magnificence, dans une sublime lumière, s'éteint peu à peu. On le regarde, ses joues tremblantes, sa bouche rentrée, son immobilisme d'où surgit parfois la seule intensité de son regard noir. Quelle composition !
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