Antoine Cuypers voulait en premier lieu faire un film centré sur un rapport de force familial : "Les premières versions du scénario étaient plus féroces, très axées autour de la revanche du personnage de Cédric (Thomas Blanchard). De version en version, on a diversifié les points de vue pour ne pas être dans un schéma noir et blanc de bourreau/victime. Dans certaines familles, on ne dit rien et tout est sous-jacent. Dans d’autres, on crie, on hurle. Et ça n’empêche souvent ni l’une ni l’autre de fonctionner. Une famille, c’est un équilibre."
Le fait que le spectateur ne sache pas exactement de quelle pathologie souffre Cédric était tout à fait volontaire de la part du metteur en scène : il ne souhaitait pas représenter un handicap en particulier comme par exemple l'autisme mais faire de ce personnage quelqu'un de mystérieux et marginal sans que l'on comprenne précisément de quoi il souffre.
Même si ce n'est pas montré clairement, il y a de la magie dans Préjudice. Ainsi, les déplacements du personnage de Cédric sont filmés comme irréels : "Lorsqu’il revient avec la carte de l’Autriche, tout en plan séquence après que sa mère l’ait enfermé dans la cuisine, en réalité la géographie de la maison ne permettait pas cela, on a créé une trappe pour permettre ce déplacement, donner à Cédric une dimension mythique. A plusieurs reprises, on lui suggère un don de prémonition aussi."
Via la famille représentée dans le film, Antoine Cuypers voulait creuser une thématique qu'il connait bien, celle de la bourgeoisie cultivée, qui peut être très violente dans la mesure où les mots qu'elle emploie peuvent créer de vraies blessures.
Antoine Cuypers avait en tête certains repas de famille célèbres au cinéma, comme celui dans Festen de Thomas Vinterberg. Les films de Maurice Pialat et Michael Haneke ont également servi de références pour le réalisateur.
Antoine Cuypers a écrit le film avec Antoine Wauters, jeune auteur belge qui monte et qu'il connait depuis le lycée. Il le sollicite habituellement lorsqu'il termine une première version de l'un de ses scénarios pour les creuser et les affiner. Dans le cas de Préjudice, l'enjeu était de faire en sorte que le repas de famille tienne le spectateur en haleine.
A l’origine, le film s’inspirait d’une expression juridique, "un préjudice grave et difficilement réparable". Il était donc question d'un procès familial. Le film est par la suite devenu plus ouvert, davantage centré sur l’état émotionnel de chaque personnage pour faire en sorte que le spectateur ne ressente pas le besoin de les juger.
Préjudice est le premier long métrage du cinéaste Antoine Cuypers. Ce dernier a précédemment réalisé plusieurs court-métrages remarqués dont A New Old Story qui comptait déjà Arno Hintjens dans son casting.
Antoine Cuypers explique comment il a choisi le couple joué par Nathalie Baye et Arno Hintjens : "Dans l’esprit des gens, Nathalie est associée à des rôles lumineux et doux, pourtant elle est très complexe, avec une vraie séduction. Je la trouvais extraordinaire dans Laurence Anyways (de Xavier Dolan). Elle a tout de suite voulu faire mon film et elle m’a fait une immense confiance. (...) Arno a accepté tout de suite ce rôle à contre-emploi, de bourgeois presque papy, c’est ça qui l’intéressait je pense."
Antoine Cuypers et Antoine Wauters, qui font tous les deux de la batterie, voulaient une musique à base de percussions : le premier a ainsi demandé au batteur de jazz Francesco Pastacaldi de lui envoyer des maquettes qui fonctionnaient bien. Ils ont ensuite enregistré en un seul jour le violoncelle et la batterie en live devant le film.