Ainsi, les frères McDonald’s, pionniers du fast food, étaient de simples artisans. Leur démarche ne les empêchait pas pour autant de servir de bons produits et après tâtonnements faire de leur lieu un rendez-vous convivial voire familial. Ils avaient inventé un autre concept de la restauration. Et surtout ils étaient dénués de tout esprit d’extension ; peu leur importait que leur savoir-faire reste local. Les frères McDonald’s avaient même une éthique ! Qui l’eût cru ?! Les multiplications de la marque McDo dans le monde, sa réputation peu flatteuse, symbole de la mal-bouffe, cet empire tentaculaire, ils le doivent à un simple artisan bonimenteur : Ray Kroc. Le pire : à leur dépens ! Ray Kroc est « Le fondateur » de ce concept ; il s’inscrit dans l’ADN de cette Amérique World Company, politique économique très libérale. Il s’est invité dans la bergerie des frères McDonald’s pour mieux les manger tout cru. Ray Kroc(que) McDonald’s ! Ray Kroc « Le fondateur » rime avec prédateur. Michael Keaton qui interprète Ray Kroc nous peint un personnage dynamique, toujours debout malgré les coups subits, passionné, animé d’aucun scrupule. Le personnage est vite antipathique. Pourtant, je suis prêt à excuser son comportement. Ray Kroc était progressiste. Son ambition ne se conjuguait pas avec l’esprit tranquille et rigide des frères McDonald’s. Ses propositions systématiquement refusées le frustraient. Il aurait pu se décourager, finir par laisser tomber devant l’inertie des frères Mc Donald’s, au contraire, il n’était pas homme à se retirer de la bergerie, il phagocyta tout de l’intérieur changeant les règles du jeu, l’éthique, s’appropriant même le nom. Tous les aficionados qui fréquentent McDo crieront au génie ! Film instructif tout en restant prudent sur les faits, et plaisant. La partie intime, personnelle, de Ray Kroc est illustrée assez discrètement ; cependant, grâce au jeu de Michael Keaton sous la direction de John Lee Hankock, on en perçoit efficacement le malaise avec sa femme (Laura Dern, impeccable) ; et quant à sa relation avec Joan Smith (Linda Cardellini) on en perçoit l’envie de la déposséder de son mari pour mieux la posséder. La séquence où il fait sa connaissance est révélatrice du personnage : on y voit un Ray Kroc la dévorant des yeux en présence de son mari. Ray Kroc ne s’en soucie pas. Comme pour les frères McDonald’s, Ray Kroc dissimule sous son sourire commercial un sourire carnassier. A voir en V.O