"Meru" est un documentaire qui raconte l’ascension de la cime centrale (la moins haute des trois cimes composant cette montagne) du pic du même nom par la voie de l’aileron de requin encore jamais vaincue, culminant à 6 310 m dans le massif de l’Himalaya. Ce genre de réalisation est la plupart du temps constitué de reconstitutions, d’ailleurs souvent bien faites, agrémentées d’interventions directes soit de journalistes en voix off, soit des véritables intervenants, soit de témoins ou de la famille. Ainsi, au gré d’interviews données pour recueillir les témoignages destinés à argumenter chaque moment, le spectateur est invité à partager cette éprouvante aventure avec eux, dans une intimité... frigorifiante ! Il découvre alors les éléments indispensables pour former une équipe de grimpeurs : en plus de l’expérience et d’un très haut niveau technique plus que nécessaires, il faut bien sûr une bonne entente, et surtout la confiance absolue. Et le mot "indispensables" prend tout son sens quand on sait que la voie de l’aileron de requin est considérée par les alpinistes comme étant l’itinéraire le plus difficile du monde... Par le biais d’images prises avec des caméras (on va dire classiques), des appareils photos, et des caméras GoPro, le spectateur est gratifié de prises de vues vertigineuses qui ne peuvent que forcer son admiration devant le grand cœur de ces hommes, devant leur force de caractère, devant leur capacité à dépasser leurs limites, et devant la beauté merveilleuse de la nature. Il est placé au cœur de l’action, par une bande son suffisamment naturelle pour qu’on leur laisse volontiers cette aventure périlleuse, bien au chaud et confortablement assis dans son fauteuil : entre le grondement des avalanches, le cri du vent glacial, et le choc inquiétant des chutes de pierres… Certes on peut féliciter les grimpeurs pour avoir bravé les éléments, qu’ils réussissent ou pas. Mais je crois qu’on peut aussi féliciter les preneurs d’images, car il est très difficile de rendre compte des pentes, du vide, de la hauteur, les caméras ayant une cruelle tendance à écraser les perspectives. A tel point que le spectateur non initié ne prendra pas forcément la mesure à chaque instant de la grande difficulté et de la dangerosité de cette ascension particulièrement périlleuse. Pour ceux qui ont eu la chance de pratiquer l’alpinisme comme moi, ce document leur parlera davantage, bien que je déplore l’insertion de quelques images de synthèse pour offrir à notre vue la façade et son environnement dans leur entièreté. Le montage est maîtrisé, et la musique particulièrement bien choisie accompagne à merveille les moments de tension, bien qu’elle soit un tantinet trop présente, car j’estime qu’il n’a pas été aménagé suffisamment de séquences où seule la nature s’exprime sans être polluée par des commentaires ou par des notes musicales : le vent, le crépitement de la neige gelée, etc… ce qui aurait permis une encore plus grande adhésion du spectateur.