Film fantastique racontant l'histoire d'une famille puritaine anglaise exilée en Amérique au XVIIe siècle, parmi les premiers colons européens qui se sont installées en Nouvelle-Angleterre, à l'extrême Nord-Est des Etats-Unis actuels. Le film reprend le folklore lié au mythe de la sorcière en évitant habillement les effets tape-à-l'oeil d'un film d'horreur classique. La démarche du réalisateur est beaucoup plus "naturaliste", comme le caractérise le fait de s'ancrer dans une réalité historique, ce qui permet de donner plus de crédibilité aux phénomènes fantastiques proprement dits. Plus qu'un simple film d'épouvante, il s'agit d'une réflexion sur la nature et la religion, avec des thèmes et des questionnements relatifs à la nature de l'homme en lui-même (dans quelle mesure celle-ci est corrompue, au travers de la question du péché originel, de la culpabilité de l'existence et du satanisme), auxquels font échos ceux relatifs à la nature en elle-même (dans quelle mesure celle-ci est elle hostile, voire malfaisante?), en illustrant ceux-ci par l'incarnation du mal dans un être fantastique, la sorcière, qui s'incarne elle-même dans les animaux liés à sont être mythologique, comme le corbeau ou le lièvre.
La figure supérieure du mal, Satan, s'incarnant quand à lui dans un bouc... noir.
Le point fort du film est selon moi l'esthétique visuelle (la photographie) et sonore qui permet d'instaurer un climat de tension perpétuel. L'action se situant autour d'une ferme isolée à la lisière de la forêt, on a presque affaire avec un huis-clos, même si il y a de nombreuses scènes en extérieur, mais toujours avec une luminosité blafarde (pas un seul rayon de soleil, mais plutôt un ciel bas, voire de la pluie, ou alors des scènes sombres, dans la forêt ou de nuit/au crépuscule). Le centre de ce huis-clos étant la cellule familiale, qui va peu à peu se disloquer au gré des évènements surnaturels qui vont intervenir sporadiquement. La santé mentale des protagonistes va ainsi se détériorer petit à petit, et, au travers des thèmes de la possession diabolique, de la folie et de l'isolement, on peut faire un rapprochement lointain avec "Shining" de Stanley Kubrick (et jusqu'au niveau musical, puisqu'on est parfois pas loin de l'"Utrenja" de Penderecki). C'est un aspect assez intéressant du film qui offre ainsi un autre degré de lecture, que ce soit au travers de références cinématographiques, mais aussi folkloriques ou picturales : au niveau folklorique, le film est d'une certaine façon un miroir inversé en version pour adultes des contes pour enfants, avec des références légères au Petit chaperon rouge ou à Blanche neige. Au niveau pictural, certains plans sont de véritables tableaux de toute beauté, qui font penser à la peinture flamande ou à certains tableaux de Goya. Alors, malgré quelques faiblesses ou maladresses, comme la trop grande rapidité de l'introduction du contexte historique de même que celle de l'irruption de phénomène surnaturels, ainsi qu'un appui parfois un peu lourd sur le thème de la culpabilité religieuse (on sent que le réalisateur a dû être traumatisé par ces questions dans son enfance), "The vvitch" est un film hautement recommandable, de par son aspect visuel et son propos qui offre une réflexion intéressante sur le satanisme (entre autres).