Début du 17ème siècle, Nouvelle-Angletterre, Thomasin, jeune adolescente, et sa famille son bannis de leur communauté puritaine de colons. Installés à la lisière d’une forêt et livrés à eux-mêmes, leur foi en Dieu sera-t-elle assez forte pour leur permettre de survivre à la malédiction qui habite le bois adjacent ?
Peu convaincu par « The Northman » qui dégoulinait de testostérone et d’un sérieux excessif, trop évitant et froussard pour me confronter encore à « The Lighthouse » dont la folie apparente et le noir et blanc m’angoissent d’avance, j’ai tenté le détour par ce premier film de Robert Eggers.
À l’apparition du générique de fin, j’avoue m’être demandé l’intérêt de tout ce foin et n’y avoir trouvé qu’une somptueuse et immersive représentation de ce que devait être le début des années 1600 dans les colonies anglaises d’Amérique. Le travail des costumes et la photographie sont sans reproches, hallucinantes, grandioses. Je pensais m’arrêter à ce constat.
Ce n’est que dans l’après-coup, après avoir passé la nuit à me réveiller en sueur, l’esprit tout embourbé de violents plans du film et du sentiment d’une présence maléfique et engloutissante à mes côtés, que cette œuvre m’est apparu comme une grande réussite.
Puis c’est le matin, au petit déjeuner, en repensant à cette nuit agitée de songes dérangeants que j’ai perçu toute la puissance de ce « The Witch » qui va chercher la terreur dans nos angoisses les plus primaires. Celles de Robert Eggers certainement, mais une forme « d’archaïsme universel » nous concernant tous. Tout y est. L’émergence des pulsions, la mère morte et putréfiante, l’effondrement d’une famille, le Diable dans les pensées incestuelles, la violence du déni et de l’interdit religieux, la cruauté de la nature et la solitude qu’elle impose.
Du grand cinéma, du grand art, qui ne se dit ou ne s’écrit que très mal mais qu’il faut absolument éprouver, sensoriellement (puis dans ses cauchemars), pour en reconnaître le génie.