On dirait que Dumont se sent à l'aise écrivant un film comique après le succès de critique de P'tit Quinquin. En fait, Ma Loute semble une continuation de la série, mais cette fois-ci adaptée au grand écran et avec un budget plus important. Dans cette comédie de début du siècle, une famille de bourgeois arrive à leur résidence d'été à la côte d’Opale. Cependant, leur repos sera interrompu par une série de rencontres avec des personnages pittoresques et par la paranoïa face aux disparitions de plusieurs touristes.
Même si n'est pas juste de les comparer, le film n'a presque rien à faire à coté de P'tit Quinquin. Ce dernier nous présentait un ample spectre de personnages uniques, quand dans Ma Loute on ne trouve qu'une troupe polarisé: riches contre pauvres, nobles contre plébéiens, cultivés contre illettrés, raffinés contre abrutis. Il y aurait aucun problème si Dumont avait tourné une comédie focalisée sur les rôles de classes, mais avec le goût de son oeuvre précédent si récent, Ma Loute avance avec difficulté pour que chaque personnage intègre son histoire dans un ensemble solide.
Deux familles à l'opposé sont plus difficiles de mélanger. Même si le romance entre les aînés de chaque famille aide pour que cette connexion se réalise, les deux heures de métrage semblent beaucoup plus longues que les trois heures et vingt de la série, qui se bénéfice d'un récit plus fluide. En plus, le changement de registre de Dumont, passant du drame à la comédie, nous avait bien surpris il y a deux ans, mais aujourd'hui le même type d'humour perd un peu son effet. Comme exemple, les sketchs des detectives Machin et Malfoy se ressemblent beaucoup à ceux des détectives Van der Wyerden et Carpentier.
Ceci dit, parlons des vertus du film car il en a beaucoup, surtout ses acteurs. Dumont a l'habitude de travailler avec des amateurs. En fait, plus d'une fois il a constitué son casting grâce aux listes du pôle emploi. Dans le cas de Camille Claudel 1915, aussi avec Juliette Binoche, il a même reçu des critiques furieuses qui présumaient que le réalisateur avait tiré parti des handicapés psychiques. Dans Ma Loute, les débutants sont à la hauteur des professionnels Surtout Raph, icône gender-less dès aujourd'hui, qui joue le rôle de Billie d'une manière exceptionnelle malgré le grand défi: incarner un personnage qui change de genre d'une scène à l'autre tout naturellement.
Puis, il faut reconnaître le mérite d'avoir traité d'une manière si badine des aspects comme la consanguinité des nobles ou le cannibalisme des pauvres. Dumont ne focalise pas sur ces aspects pour faire une parodie, sinon qu'il montre ces actes dans peu de scènes comme si elles étaient des caractères innés dans chaque classe sociale. Avec ceci, il réussit à renforcer la raillerie sociale au même temps qu'il met l'accent sur l'humour excentrique qui fatigue, certe, mais qui également marche. Finalement, la photographie est soignée au détail et elle se dilue délicatement avec des timides effets spéciaux.
Le grand bémol de Ma Loute, en gros, c'est que le baroquisme nous gave très tôt.