Je ne suis pas très fana de ce genre de film psycho sur les états d'âme des femmes larguées, mais j'ai beaucoup aimé celui là. Mia Hansen-Love a réalisé une belle oeuvre, tout en finesse, qui naturellement doit beaucoup à Isabelle Huppert, mais surtout qui évite tous les poncifs du genre (la larguée se retrouve un super mec de dix ans de moins qu'elle, et une vie dingue en reprenant une boite de nuit, ou une épicerie coopérative, suivant qu'on est dans la comédie ou le sociétal, etc...) et qui fait vivre une vraie héroïne, qui nous ressemble et à laquelle on peut s'assimiler.
Nathalie est prof de philo et adore son métier. Qui le lui rend bien, car ses élèves l'adorent aussi, bien qu'elle ne soit pas particulièrement prof /copain. Elle aime encore son appartement à Paris, sa jolie maison pieds dans l'eau en Bretagne, qui vient de la famille de son mari Heinz -et celui ci, également prof de philo (André Marcon), avec qui elle vit depuis vingt cinq ans une vie harmonieuse, autour de leurs livres, de leurs études, et de leurs enfants. Enfin, elle aime sa mère, même si celle ci est totalement insupportable. Yvette (Edith Scob) est un ancien mannequin, (et sûrement elle a été une très jolie femme), dépressive et suicidaire, cloîtrée chez elle avec Pandora, vieux chat noir et obèse, sauf quand elle se lance dans des achats de fringues hors de prix; elle harcèle sa fille de coups de téléphone. La vie de Nathalie est bouffée par sa mère: mais elle ne se plaint pas. C'est un merveille d'équilibre, cette femme!
Et puis un jour, tout se dérègle, tout lui tombe dessus à la fois. Elle était auteur de livres scolaires, et dirigeait une petite collection? Deux petits gestionnaires éditoriaux (on a immédiatement envie de les baffer!) viennent lui expliquer qu'il leur faut un objet plus vendeur! Un produit plus porteur! Remplacer sur la couverture, la tête de Descartes à la grisaille par des signes violemment colorés.... Bref, on n'a plus besoin d'elle et de ses notions esthétiques surannées. Et puis, à la Nieme intervention des pompiers, il faut se décider à mettre Yvette dans une maison, alors même qu'on sait que ce type de personnalité n'y survit pas. Et enfin, Heinz lui annonce qu'il y a une autre femme -et qu'il va vivre avec elle. Oh! il ne le fait que parce que sa fille l'a découvert, sinon, il se serait bien accommodé de cette double vie. Bref, tout à la fois.
Il lui reste tout juste son meilleur ami, Fabien (le séduisant Roman Kolinka), un de ses anciens élèves à qui elle a donné la passion de la philo, même s'ils sont très différents: Fabien s'est installé avec sa compagne dans une ferme en Vercors et est entouré d'alternatifs et de décroissants purs et durs, évidemment bien éloignés de la bienpensance bourgeoise de Nathalie (qui a quand même été communiste à vingt ans....
On suit cette femme exemplaire, introvertie, qui ne se plaint de rien, pleure beaucoup mais quand elle est seule; comment elle va garder le contrôle de son existence -oui, c'est une vraie leçon de vie. Et le message subliminal: la culture est une force. La capacité de jouir de la nature -le film, très ensoleillé, est un véritable hymne à la nature- est une force. Quelques soient les épreuves traversées par Nathalie, elle a sa richesse intellectuelle pour elle; s'asseoir au soleil sur une pelouse, serrer son petit fils dans ses bras, ou même caresser l'affreux Pandora, autant de choses, autant de moments qu'elle sait goûter. Ce film, c'est une leçon de philosophie! La vraie! Pas celle qui est distillée par des gourous aussi précieux qu'alambiqués.... A voir! (Surtout par les filles...)