Pour son premier passage derrière la caméra, le scénariste oscarisé, Aaron Sorkin s’est entaché d’un curieux matériau de base. Il est vrai que cette histoire abracadabrantesque d’une ancienne skieuse promise à une carrière fructueuse qui décide de se reconvertir dans le business de jeux d’argents après une terrible chute est loin d’être un projet innovant ou excitant.
Néanmoins, lorsque l’un des scénaristes les plus talentueux du cinéma américain décide de s’y intéressé et qu’il loue, pour l’occasion, les services d’une star comme Jessica Chastain, en tant que spectateur, il va de soi que cette production gagne une place de choix dans son agenda.
Parallèle amusant, le long-métrage qui œuvre, vindicativement, pour une vision très féministe et moderne de la femme sort au cinéma alors que la flamme de l’affaire Weinstein s’estompe peu à peu. Il pourrait être juste de considérer Molly’s Game comme le symbole d’un genre qui devrait s’émanciper à l’avenir.
Si Aaron Sorkin n’a plus à prouver ses éminents talents de scénariste et dialoguiste, il devait, cependant, faire ses preuves à la réalisation. Ecrire une histoire est une chose, la mettre en image en est une autre et elle se relève souvent bien plus ardue. Pour certains réalisateurs, il est souvent déclamé que leur capacité à mettre en valeur un scénario dépend de si ce dernier est bien écrit, je me permettrais de faire la réflexion dans le sens inverse en ce qui concerne Molly’s Game.
Bien que la mise en scène de Sorkin soit loin d’être catastrophique, elle en demeure impersonnelle et particulièrement tape à l’œil. Très vite, on y remarque les influences très scorsesienne qui viennent s’immiscer jusque dans le rythme du montage. Pour autant, nous ne sommes pas chez Baz Luhrmann au niveau de l’esthétique, les paillettes et les couleurs rutilantes se modérant derrière un scénario porter tambour battant par la radieuse Jessica Chastain.
La comédienne, d’ailleurs, est indéniablement l’une des forces du film, portant, cependant, préjudice au restant du casting.
Et c’est là que le bât blesse. Chastain éclipse tous ses partenaires, malgré un Idris Elba convainquant (le seul à réussir à se hisser par instant à hauteur de la comédienne principale), par son aura, sa prestance et son charisme ravageur.
Certains films, comme Le Loup de Wall Street (auquel Molly’s Game est inexactement comparé) parviennent, malgré un protagoniste principal très accaparant, à faire exister les autres personnages gravitant autour de lui.
Aaron Sorkin, malgré ses qualités de narrateur, oublie de donner de la consistance et de la profondeur à ses seconds rôles.
Nonobstant ce petit accro, l’intrigue, parfois un peu trop bavarde et impétueuse dans ses torrentueux dialogues, reste admirablement exposer par son auteur, réussissant à rendre ces parties de poker à la fois passionnantes et compréhensibles pour les plus néophytes d’entre nous.
Assurément, le film souffre d’un souci d’originalité qui ne plaide pas en sa faveur. Tout de fois, il remplit incontestablement son rôle de divertissement, certes pour un public un poil exigeant… On pouvait en attendre autrement pour quelqu’un de la trempe de Sorkin ! Ecrire pour les autres lui va irréfutablement mieux !